Le 3 avril 2024
Autrefois cantonné à la périphérie du globe, ou aux chemins de traverse de son propre entre-monde, le satellite Dupieux amorce avec ce grand foutoir policier un délicieux retour vers ses contemporains.
- Réalisateur : Quentin Dupieux
- Acteurs : Roxane Mesquida, Éric Judor, Eric Roberts, Marilyn Manson, Mark Burnham, Grace Zabriskie, Arden Myrin
- Genre : Comédie policière
- Nationalité : Américain, Français, Russe
- Distributeur : UFO Distribution
- Durée : 1h25mn
- Âge : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
- Date de sortie : 19 mars 2014
- Festival : L’Etrange Festival 2013, Festival de Locarno 2013
Résumé : Los Angeles, 2014. Duke, un flic pourri et mélomane, deale de l’herbe et terrorise les passants. Ses collègues au commissariat : un obsédé sexuel, une flic maître-chanteur, un chercheur de trésor au passé douteux, un borgne difforme se rêvant star de techno… Leur système fait de petites combines et de jeux d’influence se dérègle lorsque la dernière victime de Duke, un voisin laissé pour mort dans son coffre, se réveille.
Critique : Pur produit de rien du tout librement inspiré par sa propre école de contre-pensée, Quentin Dupieux (Mr. Oizo en semaine B) s’est longtemps fait passer pour un réalisateur de comédies françaises sans employer Kad Merad, ce qui est strictement impossible. D’ailleurs, on ne le voit jamais au Grand Journal, ce qui pourrait nous conduire à penser qu’il n’existe même pas. Mais puisqu’à l’instar de Fox Mulder, nous avons choisi de croire, il nous faut bien admettre que l’animal est un dangereux sans-papiers du cinéma à qui vous ne devriez pas confier vos neurones, sauf s’il se présente avec un mandat d’arrêt, ce qui fut heureusement le cas cette année à l’Étrange Festival.
Délimitant avec une jubilation gamine l’impensable no man’s land comique qui sépare Police Academy de Bad Lieutenant, Dupieux et ses sociopathes en uniforme assument conjointement – et avec panache – un certain goût pour l’abus de pouvoir en panne de sens : d’un côté, les keufs armés exigent de voir les seins des citoyennes, ou s’autorisent à vandaliser le frigo des particuliers ; et de l’autre, le bel Oizo nous impose sans trembler ses propres lois, celles d’un para-réel saturé de mourants qui ne meurent pas, de rats fourrés aux stupéfiants, ou de films grand public garnis de pneus en flammes (une obsession pneumatique qui dépasse donc le cadre de Rubber). Mais attention, si Quentin le terroriste persiste à plastiquer le sens commun à grands coups de focales tordues et d’invraisemblances paralysantes, Dupieux l’humoriste n’a jamais navigué aussi près des côtes de la basse transgression (au sud du département de la haute-absurdité). Vannes empruntées aux Farrelly, violence gratuite, poitrines velues, humiliations diverses, gros plans de gros slips, sacrilèges aux enterrements, porno rectal… Si Wrong était un jeu de pistes métaphysique faussé d’avance, Wrong Cops attire brutalement son spectateur sur le plancher des poulets. Moins scénarisé (c’est possible) que son aÏné, mais plus tripal et paradoxalement mieux tenu, le cinquième film de QD canarde l’ordre des choses au gravier, et ce avec assez d’acharnement malsain, de balayettes mentales et d’incongruité naturelle pour ne pas être confondu avec le tout-venant de la provocation amorale. Le genre d’impasse (comme les quatre autres) dans laquelle on voudrait s’engager plus souvent.
Il faut dire que la chose défile sur son podium avec une classe désormais identifiable (cadres fixes pour plans dévissés, lumières pisseuses, intensifications dramatiques ineptes, montage croche-pied) mais toujours aussi rare sous nos pauvres horizons comiques. Mark Burnham est titanesque de stoïcisme déviant, Éric Judor n’est jamais aussi bon que lorsqu’il ne cachetonne pas pour la lie du rire hexagonal, et Marilyn Manson savoure son contre-emploi (un ado semi-autiste scandalisé par les dérapages policiers) avec une grâce merveilleusement gauche. Oui, Dupieux est non seulement un réalisateur qu’il nous faut saluer au niveau des semelles - et ce parce qu’il s’acharne à construire avec une rage pré-camisole ce que d’autres n’osent envisager sous une pluie d’acides – mais sa direction d’acteurs mérite également des lauriers tendus un genou à terre. Et s’il nous faut malgré tout donner une note à cet objet hautement nécessaire au pays des intrigues haussmanniennes et des vannes régionalistes, nous nous refusons à le classer au sein de la filmographie du franc-tireur, absence de barème idoine oblige.
Partiellement descendu de son nuage toxique et appuyé contre les hommes - qu’il décide de garder en selle plus longtemps que d’habitude – QD l’incompromis en profite pour leur murmurer des insanités au creux de l’oreille, et nous sommes tout ouïe.
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birulune 1er décembre 2016
Wrong Cops - Quentin Dupieux - critique
C’est pas une série a la base ? Je me suis fait toute la saison et c’est du lourd. On se croirait en plein eighties mais tout marche a l’envers et les personnages sont obsédés par la musique qui est quasiment omniprésente chez Dupieux. Son décevant Steak n’a rien à voir car il inverse le principe du film français qui se prend gauchement pour un film ricain. Tout pue l’Amérique a plein nez, de la lumière a l’atmosphère périurbaine typique. On se croit dans une série d’après midi classique avec flics en uniformes et quartiers résidentiels impeccables et on se retrouve dans ( indescriptible ! )