Notre avis : Matthew, désormais adulte, raconte au passé son adolescence, les affres de sa jeunesse. Il a alors une quinzaine d’années et vit seul avec sa mère, son géniteur ayant disparu dans tous les sens du terme. Ils déménagent du Queens à Manhattan et décident que Matt pourrait bien se trouver un petit boulot. C’est ainsi qu’en allant livrer un petit-déjeuner étrange au 8ème étage de son immeuble, il rencontre son voisin, Lou. Ce dernier vit avec Rachel et de nombreuses guitares qu’il bichonne comme ses enfants. Ce Lou n’est autre que l’icône rock Lou Reed, chanteur-compositeur dont l’auteur brosse un portrait grinçant, en demi-teinte, le mystifiant presque, sans pour autant passer sous silence ses multiples défauts. Il est instable, imprévisible, égoïste, colérique et drogué, mais n’en est pas moins touchant, émotif, et parfois affectueux. Matt ne tarde pas à rechercher sa compagnie comme il le ferait avec un grand frère, s’efforçant difficilement de s’attirer les sympathies de cet artiste dont il connaît à peine la musique, étant plus attaché au personnage qu’à ses mélodies. Ses requêtes toujours improbables le mettront bien souvent dans des situations abracadabrantesques et pesantes, lui permettant de ce fait de grandir et garantissant au lecteur une incursion dans les rues du New-York des années 1970.
Mis à part Lou, Matt ne côtoie pas grand-monde, en tout cas personne qui ne le mène sur une voie recommandable pour un garçon de son âge. Il passe aussi du temps avec Veronica, jeune fille pauvre du lycée privé où il est scolarisé, qui est tout aussi étonnante que Lou, si ce n’est plus. Sûre d’elle en apparence et même arrogante, elle n’en est pas moins mal dans sa peau. Entre elle, le chanteur et sa mère dépressive, le narrateur ne peut que sauter d’une péripétie à l’autre, entraînant le lecteur dans son sillage.

Michael Imperioli ne tire pas cette histoire de ses souvenirs, n’ayant jamais eu la chance de vraiment connaître Lou Reed, l’apercevant tout juste en coulisses à la fin de sa carrière. À travers Matthew, touchant et inoubliable, il évoque en filigrane la naissance de la musique punk, livrant un roman d’apprentissage parfois glauque, cynique et acerbe, mais souvent badin, malgré tout. La jeunesse désabusée des années 1970 cherchait déjà à plaire, à acquérir l’approbation des adultes, d’une figure référente, quel qu’en soit le prix.