Le 15 mai 2016
Un petit film nerveux et sec sur la grande dépression.
- Réalisateur : William A. Wellman
- Acteurs : Frankie Darro, Edwin Phillips, Rochelle Hudson
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h8mn
- Date de sortie : 7 octobre 1933
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Un petit film nerveux et sec sur la grande dépression.
L’argument : Pendant la Grande Dépression des années 1930 aux USA, des centaines de milliers d’adolescents miséreux, les Hobos, se retrouvent à errer sur les routes, tenaillés par la faim et traqués par la police ...
Notre avis : Il faut à peine plus d’une heure à Wellman pour évoquer la crise des années 30 en suivant le parcours de deux jeunes amis, bientôt rejoints par une adolescente, Sally. Ce qui fascine le plus, c’est évidemment l’arrière-plan noir, voire sordide : la chasse aux clandestins, l’omniprésence de la police, mais aussi le viol (évoqué clairement), le danger permanent, jusqu’à l’accident qui prive Tommy d’une jambe. Un plan récurrent d’anonymes marchant avec, en surimpression, la carte des USA, montre à quel point l’itinéraire de ces enfants est représentatif d’une massification de la pauvreté.
Hormis une fin heureuse un peu facile, avec le juge paternel qui sauve les trois héros, les scénaristes ont évité le discours lénifiant ; les adultes sont plus du côté de l’oppression que de l’aide et, même s’ils ont mauvaise conscience, les policiers n’hésitent pas à utiliser la lance à incendie pour évacuer un camp provisoire. Rejetés de partout, les trois ados se retrouvent face à un univers hostile dans lequel les faux espoirs sont légion : la tante souriante tient visiblement un bordel, les deux malfrats qui proposent de l’argent à Eddy lui font commettre un hold-up. Nulle sécurité une fois quitté le logement familial ; malgré la douceur parental, on comprend que les enfants sont surtout une charge et n’ont d’autre choix que de partir.
Quelques séquences amusantes (l’ancre de la voiture, notamment) dissimulent mal la noirceur de l’ensemble, mais le film réussit sans pathos excessif à créer une réelle émotion : la pudeur qui lie les personnages (on se bat ou plaisante plutôt que de pleurer) émeut, comme certaines séquences (le père licencié, dont Wellman filme les pieds quand il cherche du travail, la vente de la voiture, les moments de solidarité, par exemple) et même la fin, un peu excessive, mais rendue forte par un discours social ; Eddy y lance une accusation (« vous ne voulez pas de nous »), reprise par le juge en un plaidoyer optimiste. Mais on est ravi que Wellman se concentre sur ses personnages plutôt que sur un pamphlet, leur faisant affronter diverses péripéties : il sait les mettre en valeur, les accompagner au plus près ; leur vivacité permanente rend le film dynamique, voire trépidant. Pas de temps morts, pas de graisse, on est dans l’efficacité d’une série B nerveuse.
Si le scénario est rigoureux, Wellman sait tirer le meilleur parti d’un budget visiblement limité : il manie l’ellipse avec talent (voir le vol de la jambe artificielle), mais réussit également quelques plans symboliques (la ville vue par la fenêtre de la décharge, la jambe abandonnée) et même une petite audace avec un plan subjectif (point de vue du policier bombardé d’œufs ). Néanmoins, c’est surtout par une sobriété remarquable qu’il impose un rythme soutenu. Au bout du compte, le film parvient à émouvoir et à indigner sans effets, par une simple description.
Wild boys of the road (le titre indique assez la volonté de témoigner généralement) date d’une époque, avant le Code Hays, pendant laquelle Hollywood a été assez libre pour évoquer toutes sortes de problèmes sans fard : on voit ici à quel point le ton et les événements seraient impossibles un an plus tard. Wellman n’hésite pas devant une peinture violente et crue, au moins pour l’époque. C’est ce qui rend ce petit film ramassé, nerveux, bien interprété, si précieux. Plus qu’une simple dénonciation, c’est un parfait mélange d’émotion et de passages trépidants.
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