Une montre et une radio
Le 9 février 2011
Sous son apparence faussement nonchalante, le deuxième long-métrage de Jerzy Skolimowski est animé de la même liberté déconcertante et du même lyrisme paradoxal que Rysopys. Ce diamant brut de la modernité cinématographique des années 60 n’a pas pris une ride.
- Réalisateur : Jerzy Skolimowski
- Acteurs : Jerzy Skolimowski, Aleksandra Zawieruszanka, Krzysztof Chamiec, Andrzej Herder
- Genre : Comédie dramatique, Noir et blanc, Film de sport
- Nationalité : Polonais
- Distributeur : Malavida Films
- Editeur vidéo : Malavida
- Durée : 1h15mn
- Date de sortie : 10 avril 2019
- Festival : Festival de Cannes 1965
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– Sortie en version restaurée : 10 avril 2019
– Année de production : 1965
– Sortie DVD : 10 novembre 2010
L’argument : Un jeune homme désœuvré, qui retrouve celle qui l’a jadis trahi, et dont il tombe amoureux, se laisse convaincre par un entraîneur de participer à un combat de boxe.
Notre avis : Match enlevé par un concurrent dont l’adversaire ne s’est pas présenté : voici la définition donnée par le petit Robert du walk-over, le terme technique relevant du vocabulaire sportif qui donne son titre au deuxième long-métrage de Jerzy Skolimowski. C’est en effet grâce au forfait de son adversaire que le protagoniste du film va remporter, contre toute attente, le combat de boxe qu’il appréhendait tant et gagner, une fois de plus, une montre et une radio que, comme les autres gagnées précédemment, il pourra tenter de revendre pour en tirer quelques sous.
Cette victoire dérisoire est tout à fait dans le ton d’un film déconcertant, qui accompagne avec une feinte nonchalance l’itinéraire désenchanté d’un homme plus si jeune que ça puisqu’il aura trente ans dans quelques heures mais menant toujours une existence d’étudiant attardé et participant pour la énième fois à un concours de boxe pour débutants.
Ce personnage est incarné, avec une détermination tranquille et un goût prononcé pour la dépense physique, par Jerzy Skolimowski lui-même qui reprend ici son personnage d’Andrzej Leszczyc de Rysopys. S’il a sept ans de plus (bien que quelques mois seulement séparent les deux films) il n’a toujours pas trouvé sa place dans la Pologne socialiste qui montre ici un visage bien peu souriant, avec ses conglomérats chimiques tout juste sortis de terre et ses concours de boxe minables.
Certes la rencontre avec la jeune femme ingénieur qui l’a fait évincer autrefois de leur école est l’occasion pour l’(anti)héros d’un bilan peu reluisant de son propre parcours, mais à aucun moment l’amertume ne prend le dessus. Qu’il saute d’un train en marche ou se réveille d’un cauchemar, il garde une espèce de gravité impassible qui n’est pas sans rappeler celle d’un Buster Keaton. Et le film, en dépit de son côté sombre, reste de bout en bout à la fois léger et impénétrable.
L’espèce d’urgence lyrique qui parcourait Rysopys est présente aussi dans Walkover, mais comme retenue, exigeant du spectateur une disponibilité plus grande. Mais sous l’apparence faussement lisse du film on retrouve la même nervosité rentrée, le même humour, discret et déroutant, la même élégance et inventivité formelle, la même mise à plat de tous les éléments, aucun ne prenant le pas sur les autres et deux accidents mortels entraperçus ne bénéficiant d’aucune mise en relief particulière.
Produit avec peu de moyens en marge du cinéma officiel, le deuxième long-métrage de Skolimowski étonne toujours par son audace et sa totale liberté de ton. Quarante cinq ans après sa réalisation il continue d’intriguer et de ravir.
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Le DVD
Les trois premiers longs-métrages de Skolimowski sont enfin disponibles en DVD chez Malavida. Il faut saisir cette occasion inespérée de faire connaissance, ou de renouer avec ces petites merveilles à la liberté et à la beauté radicales.
Les suppléments
Ne cherchez pas : il n’y en a pas.
Image
La photo noir et blanc, superbement travaillée sous son apparence lisse, bénéficie d’une copie en excellent état et d’un impeccable report numérique. Un vrai plaisir pour l’œil.
Son
Une mono frontale très propre qui garantit un parfait confort d’écoute pour cette œuvre plus dialoguée que la précédente. Les (rares) accords jazzy d’Andrej Trzaskowski produisent tout leur effet.
- © Malavida
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