Roi, dame, valet - La critique

Critique : En 1971, après le sublime Deep End, Jerzy Skolimowski s’engage dans une nouvelle aventure avec la firme de production bavaroise Maran Film GmbH, associée cette fois-ci avec une société installée à Beverly Hills, la Wolper Pictures Ltd. Le nouveau projet affiche des intentions clairement commerciales, misant sur plusieurs tableaux à la fois : la présence de stars, la plus-value littéraire et la réputation sulfureuse de Nabokov (Lolita), la comédie grivoise et l’érotisme soft typiquement made in Germany.

Roi, dame, valet- Skolimowski (1972)

Le résultat, présenté à Cannes en 1972, est conforme à ce qu’on pouvait attendre au vu des prémices de l’entreprise, c’est à dire hautement improbable. Le metteur en scène, se demandant visiblement ce qu’il est allé faire dans cette galère, semble avoir pris le parti d’en rire et s’amuse à jouer avec les couleurs, dessiner de charmantes arabesques et parsemer l’action de figures incongrues ou loufoques, telles ces jeunes filles perchées dans un arbre avec leurs vélos dont le bruit, d’abord non identifiable. Il parasite une scène dialoguée avant que leur présence ne nous soit révélée au détour d’un mouvement de caméra en apparence fortuit.

Roi, dame, valet - Jerzy Skolimowski (1972)

Les acteurs, en roue libre, ont l’air de beaucoup s’amuse. Gina Lollobrigida, impériale en mante religieuse quelque peu dépassée par les événements, fait montre d’un métier à toute épreuve et exhibe une garde robe chatoyante (à peu près une robe par plan). John Moulder-Brown déploie un talent burlesque insoupçonné dans un numéro déchaîné de bigleux gaffeur à mille lieux de sa subtile interprétation de Deep End. Mario Adorf est plus cabot que jamais en professeur inventeur de fausse peau humaine plus vraie que la vraie. D’autres acteurs allemands font des apparitions souvent fort drôles (Barbara Valentin). Du coup David Niven, bien qu’essayant d’oublier son flegme britannique, peine un peu à s’imposer dans ce festival de performances débridées.
On aura compris que s’il est tout à fait mineur dans la carrière de Skolimowski, King, Queen, Knave permet néanmoins de passer un moment fort divertissant, voire même de s’amuser franchement et sans trop d’arrières pensées.