Venice

Depuis Endless summer, album sorti sur le révéré label autrichien Mego en 2002, Fennesz s’est en effet définitivement installé dans le fauteuil de leader charismatique de cette musique a priori anonyme et froide. Mais ce disque, construit en partie sur des "chutes sonores" de chansons des Beach Boys, a prouvé que l’on pouvait émouvoir et même bousculer les émotions d’un auditoire à l’aide d’un simple ordinateur portable. D’ailleurs, le dernier disque live du très prolifique Autrichien, Live in Japan, en est une autre preuve éclatante.

Aujourd’hui, Fennesz revient sur le label anglais Touch, toujours à la pointe de l’avant-garde expérimentale et électronique. Venice reprend les mêmes éléments que Endless summer (mélopées abrasives, sons électroniques faits de chutes numériques recyclées et d’accidents sonores), mais va plus loin dans le dépouillement et les nuances. Inexplicablement, le disque scotche l’auditeur attentif, qui se retrouve projeté dans ce monde parallèle, sorte de Venise numérique, où un romantisme désuet côtoie des déferlantes futuristes. Parfois, une voix fend miraculeusment ce mur sonore (celle de David Sylvian, ex-Japan, en l’occurence) sur un Transit au titre évocateur ; parfois, une guitare résiste aux transformations de l’alchimiste, et apparaît presque nue et désemparée (Laguna).

Avec Venice, Christian Fennesz continue de tisser une impressionnante toile au sein du monde de l’électronique, et se positionne en véritable référence incontournable pour qui aborde cette musique, à l’instar d’un Brian Eno dans les années 70.