J’irai cracher sur vos tombes
Le 29 juin 2010
Malgré quelques longueurs, Un ange à la mer est une première œuvre pleine de grâce portée par un jeune acteur prometteur, Martin Nissen.
- Réalisateur : Frédéric Dumont
- Acteurs : Olivier Gourmet, Anne Consigny, Martin Nissen
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Canadien, Belge
- Date de sortie : 30 juin 2010
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– Durée : 1h26min
Malgré quelques longueurs, Un ange à la mer est une première œuvre pleine de grâce portée par un jeune acteur prometteur, Martin Nissen.
L’argument : Louis, un enfant de 12 ans, vit avec son grand frère et ses parents dans une petite ville du sud du Maroc. A Sidi Ifni. C’est un enfant heureux. Il aime son grand frère. Sa mère. Son père. Il adore jouer au football avec les enfants de son quartier. Il aime la mer. L’eau. Rire. Découvrir. Un enfant heureux. Un jour, son père maniaco-dépressif l’appelle dans son bureau pour lui révéler un secret qui bouleversera l’enfant !
Du jour au lendemain, il ne sera plus le même. Son enfance s’évapore ! Son innocence le quitte. Désormais, il sera un ange. Un ange-gardien qui perdra pied. C’est un ange à la mer.
Notre avis : Un ange à la mer s’ouvre sur la voix d’un enfant susurrant un poème de Charles Baudelaire, issu des Fleurs du Mal. Ces quelques vers reviennent comme un leitmotiv tout au long du film, toujours prononcés par le très jeune héros, en proie à l’angoisse, face à l’attitude dépressive et suicidaire de son père. Il ne fait aucun doute qu’il incarne bien l’ange du titre de ce premier film de Frédéric Dumont. Mais un ange noyé, dépassé par des évènements dont il ne devrait pas avoir conscience à son âge, coulé par un parent envahissant et destructeur dans sa détresse.
- © Alliance Vivafilm
Ce père déboussolé est incarné par Olivier Gourmet, toujours impliqué dans des rôles engagés politiquement ou socialement, à l’instar des personnages qu’il incarne dans les œuvres de Jean-Pierre et Luc Dardenne (La promesse, Le fils, L’enfant, Le silence de Lorna). Mais, si la composition d’Olivier Gourmet est bouleversante, celle de Martin Nissen qui interprète son fils, Louis, se révèle absolument impressionnante. Le regard frondeur, le petit garçon saisit toutes les nuances du personnage, offrant à celui-ci une force dramatique amplifiée. Transcrivant sensiblement l’état de trouble vécu par Louis, le jeune acteur fait de ce dernier un être tourmenté et adulte avant l’heure.
- © Alliance Vivafilm
Malgré sa gravité thématique, le long-métrage dégage une grâce aérienne par les séquences où le héros intègre et prend corps avec le poème qu’il s’attache à apprendre par cœur : il reste ainsi un enfant avec sa naïveté et ses maladresses. Des longueurs sont cependant à relever, par la répétition de ces scènes. La progression de la relation entre le père et le fils n’est pas sans heurts et tarde à évoluer, laissant le spectateur dans l’expectative, pouvant même provoquer un certain ennui. Néanmoins, cette lenteur paraît inhérente au poison qui s’installe chez le petit garçon ; son innocence disparaît peu à peu, malgré lui. D’où la nécessité pour Frédéric Dumont d’alterner les scènes où le sauvetage de son père s’apparente à un jeu pour Louis (cache-cache dans le coffre de la voiture, les arbres) et les scènes où le protéger est synonyme de responsabilités qui le dépassent et l’écrasent (coincé dans le coffre). Progressivement, les secondes prennent le pas sur les premières et il ne reste rien de l’enfant : l’ange s’est brûlé les ailes.
- © Alliance Vivafilm
Un ange à la mer retrace donc la prise de conscience d’un enfant de la violence des adultes, lorsque ceux-ci ne maîtrisent plus leur existence. Victime mais combattif, le jeune Louis prend sa place au sein de la famille, cherchant sans cesse son père. La mère, incarnée par la douce Anne Consigny, elle aussi dévastée par le drame de son époux, tente de protéger du mieux qu’elle peut son fils. Ce premier long-métrage évite ainsi un manichéisme moral et présente des personnages complexes et surtout imparfaits, ce qui fait indéniablement leur charme. Comme ne cesse de le répéter Louis, citant Baudelaire : « Ange plein de bonté, connaissez-vous l’angoisse, La honte, les remords, les sanglots, les ennuis ? Et les vagues terreurs de ces affreuses nuits Qui compriment le cœur comme un papier qu’on froisse ? Ange plein de gaité, connaissez-vous l’angoisse ? ».
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