Le 10 octobre 2017
Une étude de mœurs percutante sur les frustrations et névroses de la société bulgare. Malgré le manque de nuances, le film est à voir.
- Réalisateur : Stephan Komandarev
- Acteurs : Ivan Barnev, Assen Blatechki, Irini Zhambonas, Vasil Banov, Troyan Gogov
- Genre : Drame
- Nationalité : Bulgare, Macédonien
- Distributeur : Rezo Films
- Editeur vidéo : Memento Films
- Durée : 1h43mn
- Titre original : Posoki
- Date de sortie : 11 octobre 2017
- Festival : Festival de Cannes 2017
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Résumé : Lors d’un rendez-vous avec son banquier, un petit entrepreneur qui travaille comme chauffeur de taxi pour arrondir ses fins de mois découvre que le montant du pot de vin qu’il doit verser pour obtenir son prêt a doublé. Désemparé, l’homme tue le banquier et se suicide. Le drame suscite un débat national à la radio au sujet du désespoir qui a saisi la société civile. Pendant ce temps, cinq chauffeurs de taxi et leurs passagers roulent dans Sofia la nuit, chacun dans l’espoir de trouver un avenir meilleur.
Critique : Il s’agit du troisième long métrage de fiction d’un cinéaste remarqué dans plusieurs festivals (Tapei, Varsovie…) et qui a eu une première carrière dans le domaine médical. De Taxi Driver de Martin Scorsese à Taxi Téhéran de Jafar Panahi, en passant par Night on Earth de Jim Jarmusch, la corporation des chauffeurs de taxi a inspiré plusieurs auteurs. Sans se hisser à leur niveau, Stephan Komanderev réalise un récit attachant, entre l’œuvre chorale et le film à sketches, l’introduction avec l’assassinat surprise constituant à la fois le premier volet et le motif récurrent de la narration, à travers l’intervention des auditeurs à la radio. « Comme je suis ancien médecin […] j’ai essayé d’imaginer une cure pour une société malade. Quelle direction prendre pour atteindre la guérison ? J’ai décidé que le premier pas à faire pour comprendre et traiter le patient était de procéder à un inventaire franc et honnête des dysfonctionnements de la vie quotidienne dans mon pays », a déclaré le cinéaste dans la note d’intention.
- Crédit : Selma Linski
Et le diagnostic est aussi glacial que dans d’autres films en provenance des pays de l’Est, tels La mort de Dante Lazarescu du Roumain Cristi Puiu ou Faute d’amour du Russe Andreï Zviaguintsev : une société atteinte dans les fondements de la solidarité et de la dignité, et paradoxalement optimiste puisque, comme le professe l’un des personnages, les pessimistes et désespérés ont quitté le pays… ou presque. Car la faune qui défile sur l’écran constitue un bel échantillon des névroses et frustrations de la société bulgare, à commencer par les chauffeurs de taxi, tous tenus d’assurer ce métier pour survivre ou sortir de la précarité : un prêtre partagé entre sa paroisse et son automobile, un ancien comédien devenu prof de sport, un spécialiste des contrefaçons et arnaques multiples ou une ex-étudiante en histoire passée par la case prison : voilà pour la pluralité des profils de la profession.
- Crédit : Selma Linski
Quant à leurs clients, ils ne sont guère plus sereins, de l’ancien cadre corrompu du communisme devenu fonctionnaire hautain de l’Union européenne à l’enseignant en philo suicidaire, en passant par des étudiants imbibés d’alcool sans une once d’humanité… Étayé par des témoignages de chauffeurs de taxi, le scénario se veut réaliste mais pourra rebuter par ses excès de noirceur et un manque de nuances évident. Plus convaincante est la manière dont le réalisateur croise ces différentes saynètes, par l’usage de plans-séquences techniquement audacieux qui révèlent un véritable sens de l’atmosphère.
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