Bain glacé avec nains de jardin
Le 18 avril 2012
Dessinant des itinéraires croisés de rédemption à travers le choc de l’altérité , cette tragicomédie de Michael Glawogger , drôle et inquiétante , secoue autant que ses fascinants documentaires.
- Réalisateur : Michael Glawogger
- Acteurs : August Diehl, Paulus Manker, Michael Ostrowski, Pia Herzegger
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Autrichien
- Durée : 1h36mn
- Titre original : Slumming
- Plus d'informations : http://www.glawogger.com/htm/filme/...
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Sortie en Autriche : 24 novembre 2006
Dessinant des itinéraires croisés de rédemption à travers le choc de l’altérité , cette tragicomédie de Michael Glawogger, drôle et inquiétante , secoue autant que ses fascinants documentaires.
L’argument : Vienne l’hiver. Sebastian et Alex , deux jeunes gens sans problèmes d’argent et disposant de beaucoup de temps libre , pratiquent le slumming , fréquentant toutes sortes d’endroits , de préférence mal famés , où ils peuvent rencontrer des gens dont normalement ils ne croiseraient jamais la route.
Un soir ils voient , ivre mort sur un banc devant une gare , le clochard (et poète) Kallmann. Sebastian décide par jeu de le mettre dans le coffre de la voiture , de lui faire traverser ainsi la frontière tchèque et de le déposer , sans papiers , sur un autre banc , devant une autre gare , celle de la petite ville de Znojmo.
- Michael Ostrowski, Paulus Manker, August Diehl
Notre avis : Les fascinants (et secouants) documentaires visionnaires de Michael Glawogger , Megacities (1998) ou La mort du travailleur - Workingman’s death (2005), ont valu à ce cinéaste né à Graz en 1959 une réputation internationale amplement justifiée. Ses films de fiction ne sont pas moins remarquables.
Die Ameisenstraße - La rue des fourmis (1995) , Nacktschnecken - Limaces (2004) et Slumming s’inscrivent certes parfaitement dans la longue tradition viennoise de l’humour caustique marqué d’un sens aigu du dérisoire, mais, évitant la démonstration de maîtrise formelle, le cynisme facile et la noirceur trop systématique qui caractérisent trop souvent les productions autrichiennes des vingt dernières années, ils occupent une place à part dans ce paysage cinématographique là.
C’est avant tout l’acuité et la justesse du regard documentaire qui font la différence : le refus de juger ou de cataloguer ce qu’on voit, de le soumettre aux règles de la fiction ou simplement du sens.
- Slumming
Quand Kallmann, le clochard viennois, se retrouve au milieu des vaches dans une étable de ferme collective ou que, s’amusant tel un gamin à sauter sur la glace d’un étang gelé, il manque de se noyer, le choc révélateur du réel est en effet d’une force imparable et c’est d’ailleurs le sujet même du film. Car ce sont bien, sans aucun mysticisme pourtant, des itinéraires de rédemption que dessinent les parcours croisés des protagonistes de Slumming.
C’est clairement le cas pour le formidable personnage du clochard-poète alcoolique et fort en gueule interprété par Paulus Manker, plus vrai que vrai, qui au terme de son équipée tragicomique retrouve le contact avec une forme de normalité, de banalité acceptée (on le voit pelleter la neige dans les rues de la ville), mais plus encore pour celui du riche oisif qu’incarne le fébrile August Diehl et qui, plus qu’aux bourgeois qui s’encanaillaient en fréquentant les bouges mal famés (voir La tournée des grands ducs d’Yves Mirande dans screening The poor ou French cancan de Renoir), s’inscrit dans la longue tradition des dandys décadents s’amusant à jouer avec la vie des autres avant d’’être dépassés par les évènements qu’ils ont eux-mêmes provoqués. Très antipathique au départ, il devient émouvant lorsqu’il commence à ne plus maîtriser les règles du jeu et finira par se débarrasser totalement de son arrogance de surhomme au petit pied en devenant simple spectateur sidéré dans les rues de Djakarta.
Le sens du grotesque (les nains de jardin qui surgissent du trou dans la glace de l’étang), voire du carnavalesque (l’énergique Pia Hierzegger déguisée en travesti), l’absurdité de certaines situations provoquent souvent une hilarité inquiète à la vue d’un film qui surprend aussi par ses audaces visuelles, Glawogger n’ayant pas peur de l’image choc très composée, de la surprise provoquée par l’étrange beauté d’un plan. Mais c’est avant tout le refus du second degré, la manière frontale d’aborder les choses qui fait de Slumming une belle et troublante expérience de spectateur dont on mettra quelque temps à se remettre.
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