Le 26 décembre 2016
Un harakiri commercial. Une pépite musicale.
- Plus d'informations : Bandcamp du groupe
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Le Wu-Tang Clan, un collectif tellement influent qu’il a abouti a un name dropping abusif dès qu’un groupe semble y partager une correspondance. Si bien que la méfiance s’installe vis-à-vis de cette référence utilisée à tort et à travers (un peu comme ramener tous les films de mafieux du côté de ceux de Scorsese, le hors sujet vous parle ?), allant jusqu’à minimiser son importance. Pour Seppuku, le rapprochement n’est clairement pas à considérer à la légère.
Rescapés de Mentalités Sons Dangereux (MSD pour les intimes), groupe "connu" (enfin tout ça c’est relatif... Ce sont pas les Destiny’s Child non plus) pour avoir abriter en son sein Davodka, l’un des boss actuels de l’indépendant, Pei Mei, Bakyo et Mugen forment ainsi ce trio de beatmaker / rappeur, baignant dans des influences asiatiques, du hip hop crade, pour en extraire des échantillons concentrés de ce qui peut se faire de moins accessible et plus brut en matière de rap underground. Ça chuchote dans l’ombre, ça crie pour backer les rimes, ça lâche des bruits en fond sonore, ça se coupe la parole, ça rime des lyrics sans langue de bois avec des flows un peu flippants, tout ça sur des instrumentales crépitantes et glauques au possible (là, comme ça, on peut comprendre que ça ne soit très tentant).
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Avec Seppuku, impossible d’en venir à se demander « C’est quoi cette merde ? » et d’en conclure « Parce que c’est d’la zik de naze. ». Comme le Wu-Tang Clan à la sortie du classique Enter the Wu-Tang : 36 Chambers, l’alchimie de chaque aspect hermétique unifie cet univers jusqu’au boutiste, tellement extrême et sans compromis qu’il en devient accrocheur et addictif. Leur premier album (plus un EP à vrai dire), disponible sur leur bandcamp, Port du Casque Obligatoire (« pour éviter les larsens »), amorce enfin le début de projets construits et complets (instrumentales et paroles), prévus pour s’écouter d’une seule traite (25 minutes, c’est court en plus). Avec des rimes manquant de richesse et son nombre léger de punchlines (on notera cependant quelques phases efficaces et techniques), Seppuku n’ira pas marquer l’auditeur par son sens lyrical, malgré des thèmes bien tenus par les différents MCs. En revanche, et en cela le groupe tire largement son épingle du game (si tant est qu’il en fasse partie... Ce que l’on ne pense pas), Port du Casque Obligatoire tient sa ligne jusqu’au bout, plus que de ne pas user du vocodeur et de virer dans la pop, le trio de samouraï cisaille des samples et tranche dans le vif avec la tendance moderne actuelle (même dans le boom bap). Probablement réservé à des initiés aguerris pour cette raison (rien n’empêche aux autres d’essayer, après tout l’on a vu le résultat pour le Wu-Tang Clan), l’EP emporte l’auditeur dans un monde austère avec ce manque de clarté dans le mixage et cette étrange distance, comme si certaines fréquences s’étaient perdues avant de parvenir à nos oreilles. Le son ne claque pas, ne recèle aucune puissance, mais plutôt une force contenue, tamisée, presque monstrueuse, en particulier avec l’apport des flow de Mugen, Pei Mei et Bakyo, appuyant chacun sur la particularité de leur timbre, forçant la voix dans leurs chuchotements de rimes, dans une grande tradition hip hop des années 90 (sa branche la moins accessible), que l’on pensait un peu perdue en France.
Représentatif de l’osmose musicale de Seppuku, le groupe compose également ses propres productions, véritable pilier de l’atmosphère dégagée par les différents morceaux. Avant même de sortir Port du Casque Obligatoire, les membres faisaient leurs premières armes sur des projets, uniquement instrumentaux, comme pour aiguiser leur style avant de poser leur flow incisif dessus, sur un projet définitif. Alternative aux réfractaires des différentes voix agressives du trio, ces compilations s’inscrivent dans une démarche identique à la qualité constante, plus facile d’écoute sans pour autant délaisser ni adoucir la lourdeur d’une ambiance caractéristique d’une époque et d’un mouvement, dont Seppuku en est un successeur unique en France.
Un sacré cas à part.
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