Requin des îles

Sur la pochette de Requin des îles, Norman Langolff, chanteur-guitariste fils d’un compositeur rock de renom, et Gaby (alias David Concato, batteur-programmateur) prennent la pose de deux play-boys malins et sûrs de leur fait. Ils auraient tort de se gêner, vu la belle surprise que constitue ce premier album indolent, au carrefour de la chanson rétro (du jazz au funk en passant par la pop sixties) et d’une électro easy-listening, le tout pas si éloigné du swing futuriste des dernières livraisons des Rita Mitsouko.

Difficile de ne pas être admiratif devant l’inventivité des morceaux bricolés par ces deux copains d’enfance, idéales toiles de fond pour le phrasé éraillé et traînant de Langolff. Allusion aussi inquiète qu’ironique aux squales des tropiques ou du grand capital, Requin des îles apporte sa pierre à la glorification de la paresse et de l’oisiveté. En particulier avec Rocking Chair ou Sinsemilia, au thème rebattu, mais qui nous épargne le pseudo accent jamaïcain accompagnant habituellement les odes à la ganja des Kana et autres Pierpoljak. Quelques accents de mélancolie onirique surgissent par moments (112ème étage, Six mois), mais l’univers surréaliste de Norman Gaby est surtout composé de plaisirs insouciants, sortis des Iles enchanteresses de Gainsbourg et Dutronc père (le fils, Thomas, a prêté sa plume et son jeu de guitare à Requin des îles).

Ce qui fait au duo une belle famille imaginaire au je-m’en-foutisme parfaitement assumé, avec Higelin comme parrain fantaisiste et des cousins inclassables comme M ou Thomas Fersen. Joli carton à prévoir pour ce disque estival par excellence.