Le 15 août 2023
Dans un thriller aux accents et au rythme de drame philosophico-poétique, Lav Diaz propose un voyage surprenant malgré des longueurs.
- Réalisateur : Lav Diaz
- Acteurs : John Lloyd Cruz, Ronnie Lazaro, Shamaine Centenera-Buencamino, Dms Boongaling, Danilo Ledesma, Aryanne Gollena
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller, Noir et blanc, Policier
- Nationalité : Français, Danois, Portugais, Philippin
- Distributeur : Épicentre Films
- Durée : 3h07mn
- Titre original : Kapag Wala Nang mga Alon
- Date de sortie : 16 août 2023
- Plus d'informations : Le site du distributeur
- Festival : Festival de Reims 2023
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Résumé : Le lieutenant Hermes Papauran, l’un des meilleurs enquêteurs des Philippines, se trouve dans un profond dilemme moral. En tant que membre des forces de l’ordre, il est le témoin privilégié de la campagne meurtrière anti-drogue que son institution mène avec dévouement. Les atrocités corrodent Hermes physiquement et spirituellement, lui causant une grave maladie de peau qui résulte de l’anxiété et de la culpabilité. Pour guérir, il devra affronter ses propres démons.
Critique : Il est toujours pertinent, dans un thriller ou un polar, de traiter l’ambiguité morale d’un personnage. À ce niveau, Quand les vagues se retirent pousse le curseur, puisque son lieutenant, Hermes, est montré comme un véritable Docteur Jekyll par instants, et Mister Hyde à d’autres. N’hésitant pas à faire régner la violence autant qu’à la réprimer. Il fait l’ordre autant qu’il le défait. Figure d’autorité et de droiture morale, il incarne la position du sachant, en enseignant à ses élèves les tenants et les aboutissants de la résolution de crime. Dès lors, sa posture devient aussi intenable qu’haletante pour le spectateur.
- © 2023 Épicentre Films
Pourtant, de rythme effréné il n’y a point. La plupart des dialogues sont filmés à une légère distance, les deux personnages dans le cadre. Souvent, les discussions s’étirent, proposant un rythme à quitte ou double, qui demeure relativement difficile d’accès surtout au vu de la durée du métrage. Mais à condition d’accaparer notre attention, le film propose tout de même son propre temps, son propre univers, et assume sa dimension quelque peu ésotérique. La langue philippine, ou plutôt les langues, proposent un mélange de sonorités inédit pour le public français, qui tend l’oreille et distingue de l’anglais, un brin d’espagnol transformé, et des langues locales. Le tout permet une immersion dans le film par le son, et le distingue immédiatement de tout ce qui nous est connu.
La dualité profonde d’Hermes se traduit physiquement, via une maladie de peau, procédé cinégénique s’il en est. Ce qui s’apparente à un léger artifice, classique correspondance entre morale condamnable et physique décrépi, est tout de même amené avec finesse, notamment par les choix esthétiques majeurs opérés par Diaz, en tête desquels les couleurs, ou plutôt l’absence de ces dernières. Au-delà de sa valeur plastique, le noir et blanc propose un niveau de questionnement supplémentaire. Au début, lorsque Hermes aborde sa dégradation physique, le spectateur ne peut véritablement la vérifier à l’œil nu. Preuve du flou moral qui l’entoure, et de l’incapacité d’autrui à matérialiser ses failles. La rareté des gros plans et le noir et blanc, donc, confèrent une aura bien mystérieuse au personnage et à son apparence physique.
- © 2023 Épicentre Films
Ainsi, quand bien même l’entrée dans le rythme du film n’est pas chose aisée, et que sa durée importante mérite d’être questionnée, il demeure un point qui, lui, apparaît difficilement contestable : la science des plans de Diaz, tout à la fois élégants et signifiants. Ils nous sauvent d’une torpeur qui s’installe sans crier gare à quelques reprises, et nous obligent à reconsidérer positivement les quelques errements narratifs du film.
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