Le chant du coq d’un fils d’immigrés portugais en France.

Quel son fait un poulet portugais quand il caquette ? Cocorico ? En tout cas pas celui dont Carlos Batista, pour son premier roman, nous raconte l’histoire. Un poulet qui ne le sera peut-être pas toujours, qui deviendra - on l’espère - un homme, mais qui en attendant n’a trouvé que cette peau-là pour habiller son mal-être. Quant à son être, ce fils d’immigrés de la banlieue parisienne, ce Tos martyrisé par un père brûlé à la flamme sans fin du racisme quotidien, ce gosse dénigré par ses profs et planqué dans son poulailler l’a oublié depuis longtemps : "Il me fallait toujours me déconstruire pour paraître." Toujours se faire français aux yeux des Français, portugais à ceux des Portugais, directeur artistique pour décrocher un appartement minable, viril pour cacher une sexualité castrée par la violence paternelle... "Exclu et amoindri, je ne me sentais que trente pour cent portugais, quarante-cinq pour cent français, avec un déficit d’être de vingt-cinq pour cent."
Roman fracassant, écrit la rage aux dents si les poules en avaient, Poulailler pèche par un enclos mal taillé (impression de se trouver face à un livre "entre deux", trop étroit pour lui donner l’épaisseur psychologique qu’il aurait méritée, trop large pour une fable qui tourne parfois autour du pot). Mais il touche par la force avec laquelle il remue une enfance meurtrie et l’imagination avec laquelle il secoue cette ferme aux animaux où certains animaux seront toujours plus égaux que d’autres.