Philippe Jaroussky - Ombra mai fu

Notre avis
L’interprétation lumineuse de ce contre-ténor incarne merveilleusement des pièces composées au XVIIème siècle dont certaines sont régulièrement jouées et d’autres oubliées. Oscillant entre conversations galantes et pièces tourmentées, Philippe Jaroussky nous offre grâce à son timbre à la fois profond et flamboyant, une plongée dans les scènes pastorales, melodrama romains ou badinages amoureux aux délicates harmonies, parfois douloureuses dans les lamentos (l’aria de Erisenea, intitulé Uscitemi dal cor, lacrime amare).
Pour composer son album Philippe Jaroussky a exploré les 37 opéras de Cavalli, lui permettant d’attester de la grande variété de style de ce compositeur, élève de Monteverdi. Cette promenade à laquelle il nous invite, nous fait voyager des cours royales européennes jusqu’à Venise, dans le plus pur style du recitar cantando, littéralement « réciter en chantant », évoquant subtilement tour à tour des compositeurs contemporains de Cavalli comme Lully ou Haendel. De joyeux ou amoureux duos émaillent ce disque comme le délicat Ecco l’idol moi, de l’opéra Elena, interprété par Emoke Barath ou le brulant Ninfa belle en compagnie de Marie Nicole Lemieux. Un registre musical qui met à l‘honneur la théâtralisation et le récit portés par une ligne mélodique virtuose, vivante, vibrante dans toutes ses dimensions charnelles et sensuelles.

crédit photographique Josef Fischnaller

Philippe Jaroussky atteste d’une carrière de 20 ans, fêtée actuellement par la sortie de cet album, une journée France Musique qui lui a été dédiée le 13 mars et plusieurs concerts à venir. Ce célèbre contre-ténor curieux, joyeux et généreux a constitué l’ensemble Artaserse en 2002 pour l’accompagner dans un répertoire très personnel en raison des spécificités de sa voix et de ses préférences allant du baroque jusqu’à des pièces du début du XXème siècle de Debussy, voire plus contemporaines et romantiques comme celles d’Ajia Saariaho ou Marc-André Dalbavie. Il a créé l’académie musicale Philippe Jaoussky (accueillie par la Scène Musicale de Boulogne-Billancourt) qui s’est donnée pour mission de « démocratiser l’accès à la musique classique en accueillant des jeunes en situation d’éloignement culturel à travers un enseignement original, soutenu et exigeant ». Régulièrement, il invite dans ses master class ses complices musiciens tels que les violoncellistes Christian-Pierre La Marca et Geneviève Laurenceau ou le pianiste David Kadouch.
Philippe Jaroussky se produira en concert le 26 mars à Montpellier, le 28 mars à Avignon et le 5 avril à Paris.

crédit photographique Josef Fischnaller