Néoréalisme policier
Le 14 août 2024
Le premier long métrage de Visconti, adaptation du Facteur sonne toujours deux fois, marque la naissance du néoréalisme. Un coup de maître.
- Réalisateur : Luchino Visconti
- Acteurs : Massimo Girotti, Dhia Cristiani, Clara Calamai, Elio Marcuzzo, Juan de Landa
- Genre : Drame, Romance, Noir et blanc, Policier
- Nationalité : Italien
- Distributeur : Films sans Frontières
- Editeur vidéo : Films sans frontières
- Durée : 2h20mn
- Date télé : 17 octobre 2024 18:47
- Chaîne : Ciné+ Classic
- Reprise: 21 février 2018
- Titre original : Ossessione
- Date de sortie : 2 octobre 1959
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– Année de production : 1943
Résumé : Bragana tient un café-garage sur la route qui longe le Po. Gino, chômeur et vagabond, demande du travail à Bragana. D’abord méfiant, celui-ci le prend en amitié quand il découvre ses talents de mécanicien. Gino a d’autres talents et devient l’amant de la femme de Bragana, Giovanna. Très vite ils vont se débarrasser du mari gênant. Mais ce meurtre transformera leur passion en enfer.
Critique : Premier long métrage de Luchino Visconti, Ossessione est une libre transposition du roman Le facteur sonne toujours deux fois de James Cain. À vrai dire, Visconti n’avait pas obtenu les droits d’adaptation et le livre n’est pas crédité au générique. En 1939, Pierre Chenal en avait donné une remarquable version avec Le dernier tournant, interprété par Corinne Luchaire, Fernand Gravey et Michel Simon. Pour ses débuts à l’écran, Visconti, ancien assistant de Renoir, s’est entouré des scénaristes Giuseppe de Santis et Antonio Pietrangeli, futurs cinéastes du néoréalisme. Néoréalisme dont Ossessione constitue le premier film. Tourné en pleine guerre et période fasciste, l’œuvre tranche avec le cinéma standard italien de l’époque, constitué essentiellement de péplums patriotiques, de mélodrames éloquents et de comédies de boulevard nommées sous l’appellation de « téléphones blancs ». De ce courant dominant, Visconti ne retient qu’une narration linéaire, perceptible auprès du grand public, ainsi que le recours à un couple vedette. Clara Calamai remplaçait Anna Magnani indisponible et composait pour la première fois une femme du peuple, loin du fard et des artifices qui avaient consolidé son statut de star. Massimo Girotti, pendant transalpin de Jean Marais, trouvait quant à lui le rôle qui allait faire de lui une valeur sûre du cinéma italien pendant quelques décennies. De sa collaboration avec Renoir, Visconti retient un sens de la dramaturgie saisissant, ainsi que l’utilisation sobre de décors naturels. L’attitude de Giovanna et Gino envers Bragana (Juan de Landa) fait ainsi écho au complot de Janie Marèse et Georges Flamant dans La chienne, tandis que leur étreinte sur la plage rappelle certains plans de Toni.
Mais prenant ses distances tant avec cette influence française qu’avec le matériau américain d’origine, Visconti se focalise sur la description semi-documentaire des rituels du peuple italien, et intègre une critique sociale, renvoyant dos-à-dos le patriarcat du fascisme incarné par Bragana et les considérations matérialistes de certains opprimés, représentés ici par la figure cupide et intrigante de Giovanna. On est loin de l’héroïsme de Rome ville ouverte ou de l’émotion humaniste du Voleur de bicyclette, autres jalons fondateurs du néoréalisme, courant somme toute pluriel qui a été intériorisé par la personnalité de ses auteurs. On retrouve ainsi dans Ossessione la thématique des amours impossibles, qui atteindra sa plénitude dans Senso et Mort à Venise, quand les migrations internes de Gino annoncent l’arrivée à Milan de Rocco et ses frères. Et le réalisateur s’autorise même des allusions audacieuses pour l’époque à travers le personnage de l’Espagnol (Elio Marcuzzo), dont les rapports troubles avec Gino sont typiques de l’univers viscontien. En dépit de problèmes avec la censure, Ossessione fut bien accueilli et considéré très vite comme une date capitale de l’histoire du cinéma italien. Tay Garnett en 1946 et Bob Rafelson en 1981 signeront les adaptations postérieures du roman culte de James Cain.
– Première à Rome : 16 mai 1943
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