Noblesse de cœur et noblesse d’idées vont de paire chez Luchino Visconti avec la noblesse tout court, celle d’un descendant de la grande famille milanaise des Visconti de Modrone. Né en 1906, il envisage tout d’abord une carrière de musicien puis se lance dans l’élevage de pur-sang. C’est grâce à Renoir, dont il est l’assistant sur Une partie de campagne, qu’il met le pied dans le métier. Lié aux groupes intellectuels antifascistes, il participe à la résistance et tourne en même temps son premier film, Ossessione (1942), un coup de maître qui sonne l’émergence du néo-réalisme. Un style qu’il abandonnera plus tard, non sans lui avoir donné son dernier chef-d’oeuvre, Rocco e i suoi fratelli (Rocco et ses frères, 1960). Entre-temps il y aura eu le flamboyant Senso (1954), sa première reconstitution historique, un gros échec en Italie qui le détourne du néoréalisme pour un petit budget teinté d’onirisme, Nuits blanches, un nouveau revers commercial et critique.
Une période très féconde s’ouvre alors. Visconti met en scène au théâtre (notamment Sartre et Miller) et dirige la Callas à la Scala dans de nombreux opéras. En 1963, c’est le coup de tonnerre du Guépard (Il gattopardo, 1963) qui le propulse au firmament des cinéastes, suivi de Vaghe stelle dell’Orsa (Sandra, 1965) et de Lo straniero, (L’étranger, 1967), adaptation du roman de Camus.
Sa rencontre avec Helmut Berger le décide à se consacrer uniquement au cinéma. Superbement inspiré par le jeune acteur, il tournera avec lui deux des chefs-d’œuvre de sa "trilogie allemande", La caduta degli dei (Les damnés, 1969) et Ludwig (Louis II de Bavière, 1972), complétée par Morte a Venezia (Mort à Venise, 1971) où rôdera, prémonitoire, l’ange de la Mort, l’acteur adolescent Björn Andresen. Physiquement handicapé à la suite d’une attaque cérébrale, Visconti tournera cependant encore deux films, Gruppo di famiglia in un interno (Violence et passion, 1975) et L’innocente (L’innocent, 1976). Il nous a quittés en 1976 en laissant une des œuvres les plus marquantes du cinéma européen de la seconde moitié du XXe siècle.
Filmographie
– Ossessione (1942)
– La terre tremble (La terra trema, 1948)
– Bellissima (1951)
– Siamo donne (un sketch, 1953)
– Nuits blanches (Le notti bianchi, 1957)
– Rocco et ses frères (Rocco e i suoi fratelli, 1960)
– Boccacio 70 (un sketch, 1962)
– Le guépard (Il gattopardo, 1963)
– Sandra (Vaghe stelle dell’Orsa, 1965)
– Les sorcières (Le streghe, un sketch, 1967)
– L’étranger (Lo straniero, 1967)
– Les damnés (La caduta degli dei, 1969)
– Mort à Venise (Morte a Venezia, 1971)
– Ludwig II (1972)
– Violence et passion (Gruppo di famiglia in un interno, 1975)
– L’innocent (L’innocente, 1976)