La négritude est un humanisme
Le 7 mars 2006
Un nouveau recueil d’entretiens qui se démarque de l’image de légende pour aborder le regard politique d’Aimé Césaire. Françoise Vergès renouvelle le genre avec talent.
- Auteur : Aimé Césaire
- Collection : Itinéraires du savoir
- Editeur : Albin Michel
- Nationalité : Africain
- Date de sortie : 5 avril 2005
L'a lu
Veut le lire
Aimé Césaire a quatre-vingt-treize ans. Chaque jour, il rejoint fidèlement son bureau de la mairie de Fort-de-France qu’il ne dirige plus depuis 1993. Chaque année, journalistes, hommes de lettres ou chercheurs arpentent l’antichambre du grand homme en quête d’un énième entretien qui, on peut le craindre, n’apportera désormais plus grand-chose à la césairologie.
Françoise Vergès pourrait faire partie de cette cohorte, et Nègre je suis, nègre je resterai s’aborde avec une légitime circonspection. "Vous êtes réunionnaise, donc vous comprendrez facilement", lance Césaire dès la première question, mettant le doigt exactement là où se joue la différence. Françoise Vergès est universitaire, vice-présidente du comité pour la mémoire de l’esclavage, et elle ne s’attarde pas en digressions. Ses questions vont droit au but, et si le poète se laisse parfois tenter par la nostalgie de l’heureux temps du lycée Louis-le-Grand, on ne lui laisse guère le loisir de filer les anecdotes. Pour Françoise Vergès, ce qui fait la singularité de Césaire, ce sont tous les paradoxes qui ont émaillé son parcours d’étudiant, d’homme politique, de militant, de Français, et de nègre, évidemment, ce "nègre fondamental" qu’il s’évertue à chercher au-delà du décorum social et littéraire.
A la suite des entretiens, nous est proposée une "Postface - Pour une lecture post-coloniale de Césaire", un essai de Françoise Vergès autour d’une vision politique des écrits de Césaire. A l’heure où émergent toutes sortes de polémiques et révisionnismes autour de l’histoire coloniale et esclavagiste, il se dégage du discours de Césaire une indispensable réflexion sur l’identité qui s’impose comme le véritable point sensible de l’histoire des Antilles, "la difficulté de la République à lier égalité et altérité".
Aimé Césaire a quatre-vingt-treize ans. Personne ne peut lui reprocher de faire ce qu’on attend de lui, raconter son parcours d’humaniste, ses rencontres, ses expériences. Françoise Vergès réussit le prodige d’aller au-delà de cette image de légende pour rendre à Césaire la modernité de son discours politique, ses doutes, ses incohérences, ses regrets, son humanité.
Aimé Césaire, Nègre je suis, nègre je resterai, entretiens avec Françoise Vergès, Albin Michel, coll. "Itinéraires du savoir", 2005, 148 pages, 14 €
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.