Le 29 janvier 2016
- Réalisateur : Jacques Rivette
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Le metteur en scène, mort à 87, ans n’avait plus tourné depuis 2009. Il nous manquera.
Le fondateur de La Gazette du cinéma, avec les éminents Rohmer et Jean-Luc Godard en 1950, et rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma, de 63 à 65, nous a quittés.
S’il a commencé par le court (Le coup du Berger, 1956), il s’adonne ensuite à sa vision du long métrage au-delà des canons de rythme et de durée du 7e art. Amateur du plan-séquence, aimant laisser les acteurs s’exprimer dans des décors souvent nus, il occupe une place particulière au cœur du paysage français, entre une discrétion exemplaire, et un refus de se soumettre au joug du commerce, pour laisser jusqu’au bout son art s’exprimer.
Dès 1960, il se distingue avec Paris nous appartient d’une durée de 2h20. Parmi ses jalons, on citera le polémique et censuré Suzanne Simonin, La Religieuse, un triomphe public à 2.914.000 entrées (1967), L’Amour fou en 1968, fougueux de 4h10mn, l’expérience inédite de 12h40 Out One : Spectre de plus de 12h40. Carlotta éditera en coffret cette rareté formidable en 2015 : un monument érigé à la gloire de ce chantre d’un réalisme sans équivoque.
Son troisième plus grand succès commercial, il l’accomplit avec La Belle Noiseuse (4h, 277.000 entrées), dont il existe évidemment plusieurs montages aux durées diverses. Emmanuelle Béart y est formidable de sensualité et Cannes est au pied de l’auteur qui lui remet le Grand Prix. Il met en scène l’actrice en 2003 dans Histoire de Marie et Julien, des retrouvailles plus difficiles.
En 1994, un autre projet dantesque et minimaliste à la fois, en deux parties, pour des montages salles de 2h40 et 2h56, sort sur les écrans français : Jeanne la Pucelle, portée par la bravoure d’une Sandrine Bonnaire rayonnante. Un semi-échec, mais une belle œuvre. Ils se retrouvent avec le faux polar Sans Défense (près de 3h00) en 1998. Un échec.
C’est en 2001 qu’il retrouve la grâce avec Va Savoir, immense succès art et essai (306.000) qui permet au cinéaste d’afficher au moins une œuvre essentielle par décennie, sur plus de 50 ans. Un tour de force avec Jeanne Balibar superstar bobo que l’on a tant aimée. Le scénario est toujours signé de Pascal Bonitzer, son grand collaborateur depuis L’amour par terre, 1984, avec Jane Birkin (qu’il dirigera à nouveau dans son ultime film, Trente-six vues du Pic Saint Loup), Dussolier et Géraldine Chaplin, une fantaisie exquise qui dût affronter parallèlement la bonne santé de Resnais, qui sortait un mois plus tôt sa réflexion existentielle L’amour à mort.
Touche-à-tout dans les genres- polar, espionnage, amour, comédie, drame, film historique -,il avait ses muses, parmi lesquelles Anna Karina (le sulfureux La Religieuse, en 1967), Béart, Bonnaire, Juliet Berto, Marie-France Pisier, Balibar, et surtout Bulle Ogier qu’il révèle en 1969 dans L’amour fou et qui est formidable dans Le Pont du Nord. L’actrice suit le réalisateur avec constance jusqu’à son adaptation de Balzac, Ne touchez pas à la hache (avec Guillaume Depardieu et Jeanne Balibar), en 2007.
Oui, Rivette aimait aussi adapter de grands romans, (La Religieuse de Diderot), y compris étrangers, comme le classique d’Emily Brontë, Hurlevent, où il dirige un petit jeune qui monte, Lucas Belvaux. Le film passe inaperçu en 1985.
Avec la mort de Rivette, la Nouvelle Vague se tarit un peu plus et c’est bel et bien une page de notre cinéma hexagonal qui se ferme. Nous le regretterons, beaucoup.
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