Medianeras - la critique

Articulé autour de deux personnes de sexe opposé, l’Argentin Gustavo Taretto bâtit un premier film drôle, subtil et fort attachant sur la difficulté à communiquer et à trouver l’âme sœur nonobstant l’émergence des réseaux sociaux sur Internet. Indubitablement, la séduction prend !

L’argument : Martin est phobique mais se soigne. Petit à petit il parvient à sortir de son isolement, de son studio et de sa réalité virtuelle. Il est web-designer. Mariana sort d’une relation longue. Elle est perdue et confuse, à l’image du désordre qui règne dans son appartement. Martin et Mariana vivent dans la même rue, dans des immeubles l’un en face de l’autre mais ne se sont jamais rencontrés. Ils fréquentent les mêmes endroits mais ne se remarquent pas. Comment peuvent-ils se rencontrer dans une ville de trois millions d’habitants ? Ce qui les sépare les rassemble...

Notre avis : En faisant pratiquement jeu égal avec la production mexicaine (qui, au niveau de la qualité, s’affirme en tant que leader incontesté du continent latino-américain), le cinéma argentin affiche depuis une dizaine d’années un visage rayonnant marqué par un renouveau correspondant à l’éclosion de jeunes cinéastes parmi lesquels Pablo Trapero apparaît comme la figure phare (dont l’inoubliable Leonera, avec Martina Gusman, sa muse à l’écran comme dans la vie). Cette période artistique faste est déjà à l’origine de quelques petits bijoux d’intelligence et d’émotion : El aura du regretté Fabian Bielinsky, El camino de San Diego de Carlos Sorin (et ses histoires minimalistes pour une efficacité maximale) et, plus près de nous, Dans ses yeux (Oscar du meilleur film étranger) de Juan José Campanella. Fatalement, cet élan inventif ne cesse de drainer de nouveaux venus ; ainsi, après le coup de maître de Rodrigo Moreno (El custodio), c’est au tour de Gustavo Taretto de faire une entrée remarquée à la Berlinale grâce à cette première œuvre où il peaufine davantage le sujet amorcé avec son court métrage homonyme (grand prix international au festival de Clermont-Ferrand en 2006) ; à savoir l’amour à l’ère du multimédia, où l’arrivée de l’internet a radicalement changé la donne ! Le décor est planté dans sa ville natale de Buenos Aires, mégapole de trois millions d’habitants, dont il nous dévoile les spécificités urbanistiques et architecturales étroitement liées aux us et coutumes de la population locale. Les deux protagonistes principaux, esseulés à la suite d’une rupture amoureuse, vivent dans des immeubles séparés par des murs mitoyens (les "medianeras" du titre), derrière lesquels ils passent la majeure partie de leur temps à ressasser leurs angoisses dans un espace réduit et sans ouverture (ou presque) sur le monde extérieur, si ce n’est via les fenêtres de leur ordinateur... L’approche tout aussi ludique que subtile débouche sur un tas de concours de circonstances qui les feront se croiser plusieurs fois sans qu’ils s’en aperçoivent, et cela tandis que la belle Mariana cherche désespérément la perle rare qu’elle n’arrive pas à dégoter, à l’instar de l’unique page extraite du livre-jeu "Où est Charlie ?" sur laquelle le célèbre bonhomme au pull rayé rouge et blanc demeure toujours introuvable dans la cohue citadine. Si, dès l’amorce du film, il ne fait aucun doute que l’issue finale sera salutaire pour nos deux êtres solitaires en quête d’amour, on se laisse embarquer dans cette fable urbaine à l’énorme pouvoir de séduction plus que surprenant qui a logiquement su charmer le public lors de sa présentation au festival de Berlin et durant l’édition annuelle des Rencontres cinémas d’Amérique latine de Toulouse...

Sortie DVD : L’éditeur Jour2Fête proposera le film à la vente à partir du 5 décembre. Au menu du DVD, un shooting photo de l’affiche, une interview de Gustavo Taretto et la bande-annonce.