Le 17 avril 2023
Ce film quelque peu maudit de Duvivier a certes vieilli mais vaut mieux que sa réputation. Plusieurs séquences oniriques restent saisissantes.
- Réalisateur : Julien Duvivier
- Acteurs : Pierre Vaneck, Jean Galland, Marianne Hold, Isabelle Pia, Gil Vidal, Horst Buchholz, Jean Yonnel, Jacques de Féraudy, Ady Berber, Friedrich Domin
- Genre : Drame, Fantastique, Romance, Teen movie, Noir et blanc
- Nationalité : Français, Allemand
- Distributeur : Cinédis
- Durée : 1h45mn
- Date de sortie : 18 mars 1955
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Résumé : Dans un vieux château vivent de jeunes et riches enfants et adolescents délaissés par leurs familles. Ils sont partagés entre deux camps, les « sages » et les « brigands ». Vincent, un jeune homme, arrive au château et fait la conquête de tous par les histoires qu’il raconte sur l’Amérique du Sud où il a passé son enfance. Un jour, Vincent accepte de se joindre aux « brigands » pour aller explorer une mystérieuse demeure près d’un lac. Il y fait la connaissance d’une étrange jeune fille, Marianne. Dès lors débute entre eux une idylle passionnée. Malheureusement Marianne se dit séquestrée par son tuteur lequel voudrait l’épouser...
Critique : Coréalisé par Marcel Ophüls et Tony Aboyantz, Marianne de ma jeunesse est adapté du roman Douloureuse Arcadie de l’écrivain allemand Peter de Mendelssohn. Il se situe dans la filmographie de Julien Duvivier entre l’anodin L’affaire Maurizius (1954) et l’excellent Voici le temps des assassins, l’un des sommets de sa filmographie. Marianne de ma jeunesse fait partie des nombreuses coproductions franco-allemandes tournées dès le début du cinéma parlant. L’œuvre, diversement accueillie, et cruel échec commercial, souffre d’abord des défauts inhérents à maintes productions de l’époque. En fait, le film fut tourné en deux versions, l’une française et l’autre allemande, certains acteurs restant présents dans les deux (en étant doublés dans l’autre pays), et d’autres remplacés par des comédiens locaux. Ainsi, Pierre Vaneck, l’interprète principal (dont ce fut le premier film) a pour homologue germanique Horst Buchholz (les deux comédiens font en outre des caméos dans l’autre version) ; et certains acteurs allemands (Friedrich Domin dans le rôle du professeur, le lutteur Ady Berber dans celui du gardien du manoir) ont des voix françaises dans la version que nous avons pu visionner. Cela est moins regrettable que pour l’actrice allemande Marianne Hold, d’une réelle photogénie et au jeu sans doute sensible, mais dont la voix française est d’une peu supportable mièvrerie. Outre sa post-synchronisation pénible, Marianne de ma jeunesse pâtit d’une tonalité poétique emphatique et de boursouflures stylistiques, comme la musique de Roger Hubert, surlignée par un orchestre symphonique dès le générique initial, ou la diction théâtrale des acteurs, qui s’impose dès la voix off de la première séquence. Et il faut dire que Julien Duvivier n’avait pas été très à l’aise avec le fantastique, comme l’attestait son inégale version de La charrette fantôme.
- © 1955 Filmsonor Marceau, Regina. Tous droits réservés.
Et pourtant, Marianne de ma jeunesse vaut mieux que sa réputation. En premier lieu, le scénario est tout de subtilité. Le spectateur ne saura pas si Marianne est une innocente menacée par un barbon, ou bien une folle ou une manipulatrice, et encore moins un fantôme ou le fruit de l’imagination de Vincent ; de même la narration regorge d’ambigüités, comme le réel sentiment qu’éprouve Manfred (le charismatique Gil Val, ex-rival d’Alain Delon) envers Vincent. En second lieu, le métrage se réfère avec bonheur à certaines traditions du cinéma français, le challenge des jeunes « brigands » s’apparentant à l’enquête menée par les ados dans Les disparus de Saint-Agil. En troisième lieu, surtout, la mise en scène est surprenante, rappelant dans ses séquences oniriques les ambiances du Laura de Preminger ou du Château du dragon de Mankiewicz. Duvivier est ici bien épaulé par la photo de Léonce-Henri Burel (splendides prises de vue sur le lac) et les décors de Jean d’Eaubonne, artiste qui servit aussi Jean Cocteau, Max Ophüls et Jacqueline Audry. Enfin Marianne de ma jeunesse vaut par cette habituelle galerie de seconds rôles, de Jacques de Féraudy en homme à tout faire vieillissant à Jean Yonnel en chevalier, en passant par Jean Galland en beau-père cupide et la troublante Isabelle Pia en obscur objet du désir, à l’origine d’audacieuses scènes érotiques et subversives.
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