Les Vieux Fourneaux T3 . Celui qui Part - La chronique BD.

Résumé :

Ce troisième volet se déroule presque entièrement à la campagne, et commence par des visions de fin du monde, de déluge plus précisément, à l’occasion duquel Antoine apprend avec stupeur que Sophie, sa petite fille, "prend ses oeufs chez Berthe".

Berthe, c’est la paria du village. Cette personne infréquentable, mise au ban pour des raisons obscures. Pas secrètes, bien sur, mais de toutes façons tout le monde sait plus ou moins pourquoi, et puis on a pris l’habitude, et puis il faut bien sacrifier au stéréotype du petit village campagnard avec ses idiots, ses marginaux et ses lourds secrets.

A côté de ça, il y a Antoine, le révolté chronique qui s’est fait choper par la maréchaussée déguisé en abeille. Forcément, il vient se mettre au vert.

Et puis il y a Mimile qui nous fait un malaise et qui se retrouve à l’hôpital.

Il y a aussi cet espèce de vieil australien estropié qui cherche dieu seul sait qui dans ce village où personne ne comprend un mot d’anglais. Bref, un album foisonnant de vie et d’histoires, impossible à résumer en quelques lignes.

Notre avis :

Et c’est ce qui peut sembler paradoxal de prime abord : une série dont les personnages principaux sont des vieillards, a priori plus près de la fin que d’autre chose, devrait adopter un rythme à l’avenant, lent, majestueux, voire contemplatif. Mais non. Ça grouille, entre ces pages, et nos héros sont encore verts, ce n’est rien de le dire, à défaut d’être toujours parfaits ou exemplaires.

Servis par le trait mi-réaliste mi-caricatural de Cauuet (rien à voir avec l’animateur picard de sinistre mémoire, rassurez-vous), parfaitement adapté à l’ambiance, ils bondissent de pages en pages, brandissant tel un étendard leur mauvaise humeur et leurs combats à l’encontre de ce triste monde où règnent en maîtres absolus cynisme et capitalisme.

Enfin, surtout Antoine et Pierrot. Le troisième larron, Mimile, "celui qui part", donc, était jusqu’à présent plus mystérieux et surtout plus discret. Pourtant les rares indices à son sujet que l’on pouvait grappiller au détour d’une case, çà et là, étaient plus qu’alléchants : un aventurier ayant sillonné le Pacifique avant d’y faire fortune puis de tout perdre, ça éveille la curiosité. Cet album est l’occasion de mieux le connaître, et cela alors qu’il y passe le plus clair de son temps dans un lit d’hôpital. Et on se rend vite compte que c’est lui le chaînon manquant entre l’australien, la Berthe et tout le reste. On apprend ainsi, sur fond d’occupation allemande, les raisons de la mise à l’écart de Berthe, et les évènements ayant conduit au départ de Mimile. Quand au vieil australien, on ne veut pas vous gâcher la surprise donc il ne vous reste qu’à acheter l’album.

Parce que oui, il faut vous le procurer cet album !. Pour le scénario de Lupano, qui, tel un Charlier moderne, se mue de plus en plus en stakhanoviste de la BD, et ce avec un niveau de qualité constant (au bas mot). Dialoguiste hors pair, il rend ses personnages extrêmement attachants, malgré leurs côtés antipathiques, tout en faisant passer, mine de rien, une critique assez acerbe de notre société. Bref, une série à lire et à posséder, d’autant plus que le rythme de parution reste assez soutenu, ce qui nous permet de nous offrir régulièrement une dose salvatrice.