Il était une fois les sept sœurs Délicata. La narratrice, Nouk, aurait préféré porter le nom de Hepburn - comme Katharine et Audrey, ses actrices préférées - mais c’est comme ça, leur papa se nomme Délicata. Les voici donc Paloma, Esther, Mo et les autres à Noël moins cinq jours, toute à l’excitation de ce jour tant attendu. Bien sûr, elles ne sont pas seules dans ce grand appartement, il y a Méta, la gouvernante chrétienne et les deux grands-mères, dont l’une est une "princesse grecque orthodoxe" et l’autre une communiste qui porte le deuil depuis la mort de Staline.

Pour tromper leur solitude et leur ennui, les sœurs Délicata fabriquent des anges avec leur gouvernante, visitent des églises et leur crèche, entreprennent de faire le bien tout en récitant des "Je vous salue Marie", tout ceci dans le plus grand secret de leurs parents. Mais des événements adviennent qui vont de plus en plus les écarter de la joie de Noël et transformer cette fête en jour bien sombre : leur grand-mère maternelle meurt, leur mère disparaît soudainement, leur père rompt violemment avec sa maîtresse...

Sous la forme d’un conte dramatique, Geneviève Brisac égrène les mots comme le calendrier de l’Avent les jours, mais de manière extrêmement cruelle. Et si cette courte histoire n’est pas aussi efficace dans sa forme que ses précédents récits, elle n’en reprend pas moins sa thématique récurrente : celle de voir le monde contemporain s’effondrer et tous les repères s’étioler. À l’instar de Charles Perrault au XVIIe siècle, Les sœurs Délicata mêle habilement poésie et merveilleux à une certaine forme de bestialité, le tout dans un style très actuel et incisif.