Le 22 mai 2022


- Date de sortie : 5 mai 2022
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur
Disponible sur
Roman engagé et écologique, Les jours sombres est empreint d’une poésie aquatique et boisée, qui l’empêche de plonger complètement dans l’intériorité de ses héros.
Résumé : Almy grandit avec ses deux frères au bord de la rivière Penobscot et de l’océan Atlantique. Son père, artiste-rêveur constructeur de bateaux, et sa mère, journaliste engagée, partagent leur amour de la vie sauvage et des légendes amérindiennes. Cette vie en communion avec la nature bascule l’espace d’une nuit, lorsqu’un incendie volontaire ravage une ancienne usine de papier. Aussitôt la petite communauté s’embrase. La famille d’Almy, qui a pris le parti de la jeune Indienne responsable de l’incident, se retrouve au cœur de violentes tensions. Pour le héros vient le moment de tourner la page de l’enfance.
Critique : Dans ce livre, Gregory Brown rend hommage aux Amérindiens Penobscots et Passamaquoddys, à leurs légendes et à leur rapport à la nature. À travers Almy, narrateur blanc qui relate son adolescence et ce qui l’a brisée, l’auteur crée une triade dont le cœur est un pommier aux fruits fantômes, cœur battant, pulsant au rythme de la rivière qui serpente entre ses courtes phrases. D’un côté, un père amérindien et sa fille, de l’autre, Almy et sa famille, et, entre eux, un foyer voisin entre amitié et rivalité. Ces atomes humains se heurtent, le roman se fondant sur la croisée de leur existence.
Gregory Brown ne s’intéresse pas tant aux caractères de ses héros, qu’aux contes et légendes qui ont bercé l’enfance d’Almy et de ses frères, aux espoirs qui permettent à un père et à sa fille de lutter et de survivre, à l’amertume qui s’est sédimentée au fil des ans entre deux familles. Ses protagonistes flottent, ne parvenant à abandonner le ciel pour les bois, la forêt pour les flots. Les ailes de leurs avions et les coques de leurs bateaux les transforment en créatures hybrides qui vacillent et dansent d’un monde à l’autre – pourtant parties d’un même monde, d’une même terre.
Malgré quelques maladresses inhérentes aux premiers romans, Les jours sombres est un livre engagé, écologique, singulier. Ses phrases si étonnamment brèves sont empreintes d’une poésie superbe et vibrante retissant le lien rompu entre la nature et l’homme qui la ravage, qui déracine ses arbres et pollue ses eaux. Les humains inventés par l’auteur sont sensibles à elle avant d’être sensibles à eux-mêmes, Brown éveillant le lecteur bien davantage aux beautés éphémères qui se nichent sous la canopée qu’à ce que dissimulent les âmes de ses personnages, ombres peut-être trop désincarnées malgré les mythes qu’ils abritent, Atlas porteurs d’un monde fait de feuilles et de récits entrelacés.
Gregory Brown - Les jours sombres
Gallmeister
336 pages
23,70 Euros