Les Batman

En quatre films inégaux réalisés par Tim Burton et Joel Schumacher, l’homme chauve-souris a flirté avec le superbe comme avec le grotesque. Souvenirs.

L’argument : Acte 1. Gotham City est gangrenée par le crime, si bien qu’un milliardaire répondant au nom de Bruce Wayne décide de se déguiser en chauve-souris pour l’éradiquer. Il aura fort à faire puisqu’un autre allumé du déguisement, surnommé le Joker, veut dépouiller la ville de ses richesses... Acte 2. Batman a un nouveau costume très classe et un nouvel ennemi baptisé le Pingouin. Outre de fortes prédispositions à la psychopathie, ce dernier a des velléités politiques et veut répandre le chaos dans Gotham City. Un affrontement extrêmement délicat à négocier pour notre super-héros en raison de Catwoman, une diablesse tout de latex vêtue qui lui fait tourner la tête... Acte 3. Batman a un petit copain !!! Robin, jeune trapéziste orphelin, rejoint la chauve-souris dans son combat contre le crime. Ils luttent cette fois-ci contre deux nouveaux tarés : Double-Face et L’Homme-Mystère... Acte 4. Batman & Robin portent des strings sous leur costume aux symboles argentés et évoluent dans une Gotham City fluorescente. Entre deux papouilles avec Batgirl, ils combattent Poison Ivy et Mr Freeze, les deux derniers arrivants de ce fabuleux bestiaire de sociopathes.

Attention : Les deux yeux attribués à cette critique ne sont que la moyenne des notations des quatre films. En voici le détail : Batman : , Batman le défi : , Batman forever : et Batman & Robin : .

Notre avis : Acte 1. Tim Burton est un fan devant l’éternel du comic book Batman. Lorsqu’il hérite du projet d’adaptation, il y insuffle toute son admiration, sa folie et son génie pour donner corps à un rêve de gamin. Le résultat est à la hauteur des attentes de tous les fans maintenus en apnée depuis le début du tournage ; Batman flirte avec la grâce lorsque tous les éléments (réalisation, acteur, décor, dramaturgie) se fondent à l’unisson pour exploser en un seul plan vertigineux.

Longtemps conspué, Michael Keaton offre un Batman plus que convaincant (fidèle à l’œuvre de Bob Kane en fait) : fade à souhait en Bruce Wayne, psychopathe au regard révulsé en super-héros. De son côté, le Joker semble avoir été créé pour Jack Nicholson ; pour une fois le cabotinage de l’acteur sert parfaitement le film. Succès commercial, ce Batman s’apparente également à un grand film malade, dont l’univers gothique et les dualités du personnage-titre dissimulent à peine les névroses de son auteur.
Acte 2. Tout le monde rempile pour une seconde aventure. S’ajoutent à la fête Michelle Pfeiffer en Catwoman et Danny DeVito en Pingouin. Bénéficiant de plus de moyens, Tim Burton se lâche et rend une copie encore plus ambitieuse avec plus décors, d’action et d’effets spéciaux réussis (Batman pêchait un peu dans ce domaine). Mais, de cette épopée encore plus noire, on ne retient que les apparitions trop furtives de Catwoman. Nouvelle icône du latex, celle-ci minaude comme jamais et nos poils se hérissent de plaisir à chaque claquement de fouet. Un personnage culte est né !
Acte 3. Exit Tim Burton au profit de Joel Schumacher qui va apporter quelques changements à la saga. Tout d’abord, Batman se doit d’être sexy, Val Kilmer remplace de fait Michael Keaton. Ensuite Gotham City était trop sinistre dans les opus précédents, il faut ajouter un peu de couleurs bien agressives. Enfin, on prend les deux acteurs chauds du moment (Jim Carrey et Tommy Lee Jones) et on laisse en roue libre dans les rôles de méchants de service. Résultat ? Une catastrophe sur pellicule, un véritable scandale, un bordel grotesque qui toutefois amasse des dollars. Batman a complètement perdu son identité au grand dam des fans de la première heure mais pas des producteurs.
Acte 4. Ces mêmes incompétents de producteurs répètent leur confiance en Joel Schumacher et activent la mise en chantier de Batman & Robin. George Clooney se laisse séduire par ce chant des sirènes et accepte d’enfiler le costume du justicier. Aujourd’hui, il s’en mord encore les doigts et se tient pour principal responsable de cet énorme navet. Qu’il se rassure, Schumacher n’est pas loin derrière lui sur la liste des fautifs. Le film sombre dans le ridicule le plus effrayant, en raison d’une scénario bâclé, d’une réalisation incompréhensible, de dialogues d’une connerie sans nom, et d’un jeu d’acteurs frisant avec l’amateurisme (Schwarzy pire que jamais en v.o.), un véritable naufrage artistique. Seul consolation, Uma Thurman moulée dans la combinaison verte de Poison Ivy.

Les DVD


Le(s) supplément(s) à ne pas rater : Warner Home Video a soigné ces éditions collector, qui fourmillent de bonus en tous genres pour mieux appréhender l’univers de la chauve-souris maniaco-dépressive. Dans Batman, on retiendra le magnifique historique autour du personnage expliqué entre autres par Bob Kane, Mike Mignola, Frank Miller ou encore Stan Lee. Un très long (et très bon) making of (soixante-dix minutes) revient sur la mise en chantier de ce projet, de l’imbroglio juridique à l’arrivée de Tim Burton, en passant par le plaisir des acteurs à se fondre dans ce délire. Enfin, Les dessous de Batman dévoile tous les secrets de fabrication, de la Batmobile aux différents maquillages nécessités pour le Joker. Dans Batman le défi, on s’attardera plus volontiers sur le making of de soixante cinq minutes captivant d’un bout à l’autre, avec en prime le compositeur Danny Elfman à l’œuvre. Dans Batman forever, le module L’ombre de la chauve-souris revient avec une certaine honnêteté sur la passation de pouvoir entre Tim Burton et Joel Schumacher et sur le choix des autres acteurs. Enfin de Batman & Robin, on applaudit des deux mains ce documentaire qui cherche à comprendre les raisons de ce naufrage. Tous s’expriment avec une certaine sincérité dix ans après, mais seul le réalisateur assume pleinement la responsabilité et, par ma même occasion, la haine des plus virulents à l’égard de cet opus. Gros bémol, aucun des commentaires audio sur les quatre films n’est sous-titré.

Image & son : L’excellence est au rendez-vous pour ces éditions collector tant au niveau de l’image que du son. Qu’il s’agisse du clair-obscur de Tim Burton ou de l’éclairage aux néons de Joel Schumacher, les transferts restituent impeccablement les photographies respectives des films. Le son n’est pas en reste avec un déploiement d’effets qui mettront à rude épreuve votre matériel.