C’est donc ton frère !
Le 6 octobre 2010
D’une liberté de ton totale, le film de Juraj Jakubisko, poème à base de coq-à-l’ânes et de trouvailles visuelles, allie humour absurde, inventivité formelle et choc documentaire avec un bonheur expressif qui enchante.
- Réalisateur : Juraj Jakubisko
- Acteurs : Jirí Sykora, Jana Stehnová, Vlado Müller, Miriam Kantorková, Mária Sýkorová
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Slovaque
- Editeur vidéo : Malavida
- Plus d'informations : http://jakubiskofilm.com/jakubisko/cz/
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– Durée : 1h34mn
– Titre original : Kristove Roky
D’une liberté de ton totale, le film de Juraj Jakubisko, poème à base de coq-à-l’ânes et de trouvailles visuelles, allie humour absurde, inventivité formelle et choc documentaire avec un bonheur expressif qui enchante.
L’argument : Andrej et Juraj sont frères. Andrej, qui est pilote de guerre, est d’un naturel combatif et décidé. Juraj est un artiste sans cesse agité par le doute sur lui-même et sur sa vie. Andrej rend visite à Juraj et fait la connaissance de Jana, son amie. En plaisantant, il propose à son frère de lui prendre Jana.
Notre avis : Parfois surnommé le Fellini tchécoslovaque, Juraj Jakubisko est un artiste dont le talent multiforme et la liberté créatrice avaient déjà été remarqués dans divers festivals grâce à Mlčení (Silence)[1963], Déšť (La pluie) [1965] ou Čekají na Godota (Ils attendent Godot)[1966]. Ils éclatent dans ce premier long-métrage réalisé à 29 ans .
Grand Prix à Mannheim en 1967, Kristove Roky a pour figures centrales un alter ego du cinéaste (ils s’appellent tous les deux Juraj), artiste peintre menant à Prague une existence bohème de vieil adolescent instable, et son frère Andrej, à la vie plus rangée mais qui a gardé lui aussi le goût des jeux de l’enfance.
La propension au jeu et à la facétie (volontiers provocatrice) sont au coeur de la démarche esthétique du film qui nous entraîne dans une fête virevoltante en recourant avec un rare bonheur à toutes les figures de style du cinéma moderne des années 60 : refus du carcan narratif, collages visuels et sonores, angles insolites, juxtaposition de plans très composés et de prises documentaires, faux raccords, irruption de plans en couleur.
Le chef opérateur Igor Luther a réalisé un étonnant travail, obtenant grâce à une surexposition délibérée un noir et blanc sans nuance qui donne à chaque plan la netteté d’une épure graphique.
L’inventivité formelle et la virtuosité d’exécution semblent sans limites et pourtant, à aucun moment, cette légèreté ne paraît vaine ou gratuite , car toujours est présente une gravité souterraine, un sens de la fragilité et du dérisoire poignant de l’existence.
L’alliance entre le goût du carnavalesque et le choc documentaire est particulièrement frappante dans les magnifiques scènes de bal populaire ou de fête foraine. Mais tout le film est traversé d’éclairs saisissants comme cette apparition soudaine, à l’arrière-plan d’une conversation dans un café, d’un ivrogne béât sur lequel la caméra se fixe un moment avant de revenir à la scène principale.
La gravité souterraine fera irruption à la mort du frère, annoncée par des inserts d’avions en chute libre, images mentales de ses appréhensions. Et la stupéfiante scène d’enterrement aura l’air sortie tout droit d’un documentaire ethnographique.
Ces Années du Christ, qui se prennent si peu au sérieux, parviennent à fixer avec une merveilleuse acuité l’air du temps de la Prague bouillonnante des années 60 et la mélancolie de la province slovaque. Juraj Jakubisko est assurément un artiste de première importance dont la (re-)découverte s’impose de toute urgence.
Deux ans plus tard Jakubisko réalisera (Les oiseaux,les orphelins et les fous),
Le DVD
Le DVD de Kristove Roky est un des fleurons de la nouvelle collection slovaque de Malavida. Il est disponible chez l’éditeur, en magasin et sur amazon.fr à partir du 7 octobre en même temps qu’un autre film de Jakubisko, Les oiseaux,les orphelins et les fous réalisé deux ans plus tard.
Les suppléments
Comme pour les autres titres de la collection, Il faudra se contenter d’une partie ROM contenant des biographies et une brève revue de Presse ainsi que d’un livret (qui ne nous a pas été fourni).
Image
La copie est d’assez bonne qualité (pas de rayures) mais la surexposition (blancs aveuglants) rend sa vision un peu éprouvante et la définition est médiocre (pas mal de grain), mais ces imperfections (en partie volontaires) ne gênent pas trop la vision, participant même de la beauté fragile du film. Les brèves parties en couleur sont très belles.
Son
Un son mono tout à fait correct permet d’apprécier dans de bonnes conditions les savoureux collages sonores de Kristove Roky.
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