Ponton sur le Danube
Le 3 octobre 2010
Témoignage précieux de l’effervescence artistique et politique en Tchécoslovaquie au début des années 60 , ce film très nouvelle vague impressionne par sa virtuosité formelle mais dégage aussi un charme véritable.
- Réalisateur : Štefan Uher
- Acteurs : Marián Bielik, Ol’ga Šalagová, Andrej Vandlík
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Slovaque
- Editeur vidéo : Malavida
- Plus d'informations : http://www.malavidafilms.com/malavi...
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– Durée : 1h30mn
– Titre original : Slnko v sieti
Témoignage précieux de l’effervescence artistique et politique en Tchécoslovaquie au début des années 60 , ce film très nouvelle vague impressionne par sa virtuosité formelle mais dégage aussi un charme véritable.
L’argument : Fajolo est étudiant à Bratislava. Il ne pense qu’à son transistor et à la photo. Avec sa petite amie Bela, il adore bronzer, sur le toit de sa maison. Bela vit dans une ambiance familiale détestable, entre une mère aveugle et un père qui est une véritable épave. Fajolo ne comprend pas ses problèmes et ne lui est d’aucune aide. Un jour, en colère, elle casse son transistor. Fajolo, furieux, cesse alors de la voir. Mais il s’aperçoit très vite qu’il tient à elle...
Notre avis :Le deuxième film de fiction de Štefan Uher (1930 -1993), cinéaste slovaque qui avait auparavant tourné des documentaires remarqués, est considéré comme le détonateur de la nouvelle vague tchécoslovaque.
Il s’inscrit dans le mouvement général qui, au début des années 60, a fait éclore un peu partout dans le monde des oeuvres en rupture avec les schémas formels et narratifs d’un cinéma classique engoncé dans ses conventions et ses corporatismes rigides.
Cette variante slovaque de L’amour à vingt ans affiche de manière ostentatoire les signes de la modernité, assumant totalement le caractère hétérogène de ses éléments constitutifs : narration non linéaire, ruptures de ton, arrêts sur images (lorsque Fajolo prend des photos), voix off du protagoniste commentant ce que nous voyons, juxtaposition de la fiction et du documentaire.
Certes , la liberté de ton est un peu bridée par des dialogues littéraires et un scénario par moments trop chargé de sens qui affaiblissent la charge de réel pourtant très forte de Slmko v sieti. On doit sans doute en imputer la responsabilité au romancier Alfonz Bednár qui a adapté ici ses propres nouvelles. Son talent n’est pas en cause, mais force est de constater que le romantisme slave a encore fait des ravages ici. Le personnage complètement artificiel de la mère aveugle (qui cogne dans les meubles de son propre appartement !) et le pessimisme désabusé des commentaires paraissent aujourd’hui datés et convenus.
Quant à la démonstration de virtuosité formelle, elle impressionne mais pourra paraître un brin gratuite. On restera néanmoins ébahi devant le formidable travail d’éclairage et de composition de l’image du chef opérateur Stanislav Szomolányi, ou celui, non moins élaboré, de la piste-son, dont la musique non descriptive de Ilja Zeljenka n’est qu’un élément parmi d’autres.
Les pesanteurs diverses n’empêchent pourtant pas qu’une vraie légèreté parcourt ce film attachant. La jeunesse d’interprêtes débutants y est pour beaucoup.
Mais c’est surtout sa forte charge documentaire qui donne son impact à Slmko v sieti : les enfants jouant dans la cour de l’immeuble, le toit encombré d’antennes de télévision surplombant une Bratislava bien grise, les transistors hurlant leurs tubes de variété, un ponton sur le Danube avec son couple de vieux pécheurs et la présence bien perceptible de l’eau, les scènes de moissons (auxquelles le héros participe comme volontaire), des plans inutiles de visages de paysans : tout cela est observé avec attention et vit intensément à l’écran.
Le portrait que brosse le film de la vie dans le monde du socialiste réel n’est pas très édifiant et on ne saurait nier le caractère contestataire de nombreuses notations , en particulier sur la gestion de la ferme collective. Le film ne manqua d’ailleurs pas d’être interdit dans un premier temps.
Témoignage précieux et méconnu de l’effervescence artistique et politique qui régnait en Tchécoslovaquie dans les années qui précédèrent le Printemps de Prague, Le soleil dans le filet méritait amplement d’être redécouvert. S’il est daté par certains côtés il n’en conserve pas moins, de par sa splendeur formelle, un fort pouvoir de séduction et dégage un charme véritable.
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Le DVD
Malavida poursuit son passionnant travail de redécouverte des pans méconnus du cinéma européen avec une fort belle édition DVD du film de Štefan Uher dans le cadre de sa nouvelle série consacrée au cinéma slovaque. Disponible le 7 octobre 2010 chez l’éditeur, sur amazon.fr ou en magasin.
Les suppléments
Un livret accompagne le DVD. On peut y lire une interview de Štefan Uher par A. Liehm. Une partie ROM contient des biographies de Štefan Uher, Bednár et Stanislav Szomolányi ainsi qu’une mini revue de presse.
Image
Le master restauré est de toute beauté et permet d’apprécier le superbe travail du chef opérateur Stanislav Szomolányi, un noir et blanc contrasté et chatoyant parfaitement restitué en DVD.
Son
Une piste mono franche et nette, parfaitement restaurée elle aussi, qui met en valeur la musique non illustrative de Ilja Zeljenka et le travail remarquable sur les bruits et les voix. Sous titres en français ou en anglais, au choix.
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