Ils se sont tant aimés
Le 29 février 2024
Xavier Dolan persiste et signe en imposant son style pictural et référencé. Après J’ai tué ma mère, Les amours imaginaires ne déçoit pas... bien au contraire.
- Réalisateur : Xavier Dolan
- Acteurs : Louis Garrel, Anne Dorval, Xavier Dolan, Monia Chokri, Niels Schneider, Perrette Souplex, Anne-Elisabeth Bossé, Magalie Lépine Blondeau
- Genre : Comédie dramatique, LGBTQIA+
- Nationalité : Canadien, Québécois
- Distributeur : MK2 Distribution
- Durée : 1h42mn
- Date de sortie : 29 septembre 2010
- Festival : Festival de Cannes 2010
Résumé : Francis et Marie, deux amis, tombent amoureux de la même personne. Leur trio va rapidement se transformer en relation malsaine où chacun va tenter d’interpréter à sa manière les mots et gestes de celui qu’il aime...
Critique : Bang bang, la chanson de Nancy Sinatra, reprise par Sheila, rythme Les amours imaginaires, marquant les temps forts et soulignant les élans de désirs de chacun des trois personnages centraux. Le désir - fantasmatique et fantasmé - est au cœur du second opus de Xavier Dolan, après J’ai tué ma mère. L’amitié platonique qui lie Marie et Francis est mise à mal par l’arrivée d’un ange blond, aux allures de Cupidon... à ceci près que les flèches tirées ne sont pas pour offrir l’amour à autrui mais en recevoir lui-même.
- © MK2 Diffusion
Si le bellâtre n’a pas volontairement envie de nuire à ses amis, il n’en est pas moins vrai qu’il s’amuse à entretenir l’ambiguïté, le doute, le trouble autour de ses sentiments à leur égard. Comme sorti de nulle part, le jeune mâle représente l’homme idéal pour Marie comme pour Francis qui, l’un comme l’autre, reporte sur lui toutes leurs attentes sentimentales et sexuelles. Le moindre geste est soumis à interprétation et se retrouve systématiquement connoté d’attentions purement imaginaires. Un triangle (isocèle !) amoureux se crée entre les trois personnages ; leurs rapports ne sont pas érotiques, mais érotisés par des intentions masquées par la pudeur et le désir réfréné, créant une tension pour le moins palpable. Ce non-dit charnel n’est pas sans rappeler la séquence de La robe d’été de François Ozon où, face à son amant dansant - justement - sur Bang bang, le héros tente l’impassibilité et de retenir ses sentiments à son égard.
- © MK2 Diffusion
Reprenant le procédé stylistique de son précédent film, Xavier Dolan use avec justesse et parcimonie des ralentis pour marquer le passage d’un état à un autre dans l’esprit - et surtout dans le cœur - des personnages, donnant aux Amours imaginaires une grâce poétique constante. Les couleurs sont vives, excessivement écarlates, comme autant d’indicateurs des émotions, sans cesse fluctuantes, des protagonistes. Cette œuvre picturale se révèle par ailleurs traversée par moult références cinématographiques, à commencer par le couple central : Marie, pleine de charme, la garde-robe volontairement rétro, ressemble à s’y méprendre à Audrey Hepburn. Francis, lui, l’espace de quelques instants, se plaît à se prendre pour James Dean dans La fureur de vivre. On ne peut également pas passer à côté de l’influence de la Nouvelle Vague sur le cinéaste. En effet, celui-ci ponctue Les amours imaginaires de séquences reprenant clairement l’incontournable scène d’introduction du Mépris. Toutes ces allusions à ces cinéastes et œuvres fortes de l’histoire du cinéma servent à marquer le décalage des deux amis par rapport à la réalité.
- © MK2 Diffusion
Hors du temps et doté d’un humour composite par la maladresse et les erreurs de ses personnages, Les amours imaginaires installe la signature stylistique et scénaristique de Xavier Dolan qui défend ses goûts cinématographiques et sa culture à travers les personnages qu’il met en scène. Le jeune cinéaste, manifestement très inspiré, n’a peur de rien, ni du kitsch, ni de la surinterprétation, livrant ainsi une œuvre sincère et passionnée.
- © MK2 Diffusion
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roger w 7 octobre 2010
Les amours imaginaires - Xavier Dolan - critique
Certes, les dérives sentimentales de ce trio amoureux manque un petit peu de recul (le cinéaste est jeune et cela se sent), mais on ne doit pas négliger l’impact des recherches esthétiques de l’auteur. D’une belle sensualité, le film séduit par sa superbe photographie, par son attention aux décors et costumes et par son ambiance musicale (superbe musique de Fever Ray, groupe suédois). Un pur bonheur pour ceux qui aiment les films avec ados torturés.
Frédéric Mignard 7 octobre 2010
Les amours imaginaires - Xavier Dolan - critique
Poseur, affecté et sans charisme, Les amours imaginaires apparaîtra dans 20 ans pour son auteur comme une oeuvre de jeunesse un brin prétentieuse et surtout inlassablement vaine. Un oeil pour la musique !
Pierre Ajack-Dugant 12 octobre 2010
Les amours imaginaires - Xavier Dolan - critique
En dépit de certaines séquences "publicitaires" (poses affectées, kitsch assumé) qui parfois agacent, le film est une véritable réussite. L’humour y côtoie sans cesse la gravité des sentiments dans une belle valse érotique, menée par un trio d’acteurs brillants. La naissance du sentiment est décrite de façon minutieuse et restitue à merveille le phénomène amoureux dans sa simplicité / complexité.
Audacieux et subtil.