Les ambitieux - Catherine Corsini - critique

Critique : Les ambitieux ou la rencontre de deux mondes. Celui de Julien, jeune écrivain provincial débarqué à Paris plein d’illusions, d’espérances et, sous des airs timides et modestes, d’une vraie soif de réussite sociale. En face, une éditrice apparemment sûre d’elle et installée, autoritaire, au mépris facile mais qui refoule une partie de son passé. Après une rencontre catastrophique, ils deviennent amants. Sur cette rencontre improbable, à laquelle on avoue quelques difficultés initiales à adhérer, mais parfait postulat de comédie, Catherine Corsini, sans se prendre au sérieux, greffe une réflexion pertinente sur l’ambition.
Jouant des clichés pour mieux les travailler, elle fait évoluer ses personnages, jusqu’à rendre crédible la fin de la fable. Entre-temps, le couple se déchire (elle lui reproche avec raison son sens très relatif du scrupule ; il lui révèle ce qu’elle a toujours refusé d’affronter). D’autre part, avec un peu de chance, l’ambition conduit à la réussite (les échecs sont remarquablement abordés à travers le personnage incarné par Gilles Cohen, très impressionnant en bouffon pathétique, victime d’un système dont il faut maîtriser les codes). Mais le succès n’est pas sans prix et, sur son chemin, la trahison pointe souvent le bout de son nez. Et quoique compris et non condamnés car finalement très humains, les personnages de Catherine Corsini ne sont sauvés qu’in extremis.
Conclusion qui clôt agréablement cette comédie vive, portée par des dialogues amusants, vachards, lucides et dotée d’une interprétation de choix. Éric Caravaca apporte tout ce qu’il faut de modestie, soumission, rouerie et naïveté mêlées pour être attachant malgré ses coups bas. Karin Viard, toujours dynamique, séduit totalement en femme cassante, dominatrice mais finalement incapable de tout maîtriser. Sensibles et capables d’inspirer beaucoup de sympathie, ils sont l’un des atouts maîtres de cette comédie non dépourvue de gravité, drôle et parfois émouvante.