Romans policiers
Le 20 novembre 2002
Un polar original, dans un style dépouillé mais efficace.
- Auteur : Rosa Montero
- Editeur : Métailié
- Genre : Polar
Intrigue contemporaine mêlée de légendes médiévales, Rosa Montero signe avec Le territoire des barbares un polar original, dans un style dépouillé mais efficace, avec une attention toute particulière accordée à la construction psychologique de son héroïne et des personnages qu’elle croise, en souvenir, en rêve ou dans la réalité.
Sofia Zarzamala semble être une de ces héroïnes sans histoire, qui travaille dans une maison d’édition et prépare, en médiéviste confirmée, une édition de luxe du Chevalier à la rose de Chrétien de Troyes. Pourtant, dans la vie de celle que l’on nomme Zarza, tout est silence, solitude, effacement, détachement, perte de soi délibérée, oubli du passé méticuleusement orchestré. Elle a construit un solide rempart entre elle et les gens, entre elle et le bonheur.
Et puis un matin, alors qu’elle est sous sa douche, la sonnerie du téléphone traverse l’épaisse muraille qui la sépare du monde et ces quelques mots, "je t’ai retrouvée", suffisent pour tout faire resurgir comme une nausée soudaine et brutale.
Le premier instinct de la bête traquée est de fuir, tête baissée, souffle court, pour échapper au prédateur. Mais Zarza ne peut se résoudre à disparaître sans se retourner et imperceptiblement, la galerie des images du passé s’illumine, dans un halo de lumière blanchâtre et glauque ; le lecteur comprend alors, ou plutôt devine, à travers les chaos du souvenir qui redevient chair et souffrance vécue, qui a retrouvé la pâle Zarza et quelle faute elle a commise pour avoir voulu se cacher, s’oublier et se faire oublier.
Ce travail de mémoire nous fait traverser les bas-fonds d’une enfance douloureuse et étouffée, entre une mère suicidaire, un père aux regards malsains, une grande soeur absente et un petit frère autiste, puis la dure adolescence d’une jeune fille entraînée par son vénéré jumeau dans l’enfer de la Blanche. La poudre blanche, celle dont on ne peut plus se passer, celle qui rend faible, violent, voleur, menteur, mac ou pute, celle qui conduit en prison. Celle qui mène aux pires trahisons, même celle d’un frère.
L’originalité de ce polar se joue dans les intrigues médiévales que Rosa Montero distille avec habileté et finesse dans le récit. Au lieu d’en brouiller le rythme, elles accompagnent l’angoissante détresse de Zarza, qui, rongée par la culpabilité, choisit finalement d’affronter les ombres ressuscitées du passé.
Rosa Montero, Le Territoire des barbares (El corazón del tártaro traduit de l’espagnol par André Gabastou), Métailié, coll. "Bibliothèque hispanique", 2002, 225 pages, 18,50 €
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Karine, de Lyon 4 novembre 2004
Le territoire des barbares
Un récit à la fois simple et puissant qui aborde sans aucune mièvrerie des souffrances liées à l’enfance mais qui sait distiller une magnifique foi en la vie. Une histoire qui se construit comme on essaie de remettre en ordre un ’Rubik’cube’, objet à la la charge symbolique évidente, présent dans cette fiction de manière répétitive.
En ayant choisi de faire de l’héroîne un personnage capable de mettre son destin en parallèle avec celui de certaines figures médiévales, Rosa Montero fait de Zarza un être de papier hors du temps, universel...Personnage que l’on aimerait ne pas devoir quitter une fois le roman terminé.