Le 11 mars 2022
Dans cette tragique comédie des humeurs, se croisent des pécheurs qui tous illustrent un aspect de la société anglaise d’après-guerre. Un classique délicieusement désuet et cruel sous ses abords ensoleillés !


- Auteur : Margaret Kennedy
- Collection : Quai Voltaire
- Editeur : Editions de la Table Ronde
- Genre : Roman
- Nationalité : Anglaise
- Traducteur : Denise Van Moppès
- Titre original : The Feast
- Date de sortie : 3 mars 2022
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur

L'a lu
Veut le lire
Résumé : Cornouailles, 1947. Comme tous les étés, le révérend Seddon rend visite au père Bott. Hélas, son ami n’a pas de temps à lui accorder cette année, car il doit écrire une oraison funèbre : l’hôtel de Pendizack, manoir donnant sur une paisible crique, vient de disparaître sous l’éboulement de la falaise qui le surplombait. Et avec lui, sept résidents…
Critique : Élaborant une comédie des humeurs qui s’achève comme s’achèverait une tragédie, Margaret Kennedy critique la société anglaise d’après-guerre, avec finesse et humour. En effet, l’autrice ne s’exclut pas du tableau comme le ferait un satiriste et adopte un point de vue neutre, quoique concerné. Elle semble ainsi admettre bien volontiers que chaque classe sociale a sa part de responsabilité dans le drame humain qui se joue en 1947, entre tickets de rationnement trop rares, pénuries et villes ravagées par les bombes à reconstruire.
En Cornouailles, sous le soleil estival et sur les falaises albescentes, les désagréments de l’époque transparaissent derrière les drames lilliputiens du quotidien, de la cuisine au salon, de la plage à la confiserie. Outre cette période difficile, c’est l’individualisme des Anglais que Margaret Kennedy met en lumière en imaginant, perdus au sein de la petite communauté qu’elle invente, des personnages allégoriques, porteurs des sept péchés capitaux. Outre ces héros dont seule la charpente est archétypale, chacun des occupants de la pension des Siddal a des travers que l’autrice met savamment en avant, créant des situations finement orchestrées pour souligner défauts et caprices des domestiques autant que des Sirs et autres Ladies, des orphelins autant que des veuves, des chanoines autant que des gérants.
Pèse sur cette indolence l’inévitable fatalité, la tragédie finale, annoncée dès le prologue. Ainsi, malgré la langueur des vacanciers, l’atmosphère a ce petit quelque chose de lourd, certes allégée par les bêtises des enfants, les amourettes des adolescents et les crises conjugales. Celles-ci donnent du corps au Festin, de même que les extraits de lettres et de journaux qui viennent parfois rythmer la narration. Pour cette langueur et cette tendresse occasionnellement acide, d’aucuns songeront à la plume d’Elizabeth Jane Howard et à ses peintures humaines si précises. Ici aussi, la délicatesse du coup de pinceau est de mise, et ce malgré la cruelle fable à l’œuvre.
Margaret Kennedy - Le festin
La Table Ronde
480 pages
135 x 220 mm
24 euros