La faute du père
Le 12 novembre 2012
Bien qu’adapté d’un roman à thèse de François Coppée le film d’Antoine échappe à la grandiloquence et à la démonstration. C’est un admirable et sobre drame naturaliste dont se dégagent de bouleversantes figures féminines ainsi qu’une superbe déclaration d’amour à la ville de Paris.
- Réalisateur : André Antoine
- Acteurs : Sylvie, Léon Bernard, Jacques Grétillat , René Hiéronimus, Romuald Joubé, Zéphora Mossé, René Roche, Mona Gondré
- Nationalité : Français
- Durée : 1h21mn ( version incomplète, restaurée en 1987)
- Date de sortie : 5 octobre 1917
- Plus d'informations : http://filmographie.fondation-jerom...
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Bien qu’adapté d’un roman à thèse de François Coppée le film d’Antoine échappe à la grandiloquence et à la démonstration. C’est un admirable et sobre drame naturaliste dont se dégagent de bouleversantes figures féminines ainsi qu’une superbe déclaration d’amour à la ville de Paris.
- Le coupable (André Antoine 1917)
L’argument :Un jeune criminel paraît au banc des accusés. L’avocat général doit prononcer le réquisitoire. Et, à la stupéfaction de tous, il commence en ces termes : Vous voyez en moi un homme très malheureux, dont le cœur est déchiré par le remords. Il raconte alors que ce jeune homme est l’enfant qu’il a eu d’une femme qu’il a lâchement abandonnée. En effet, obéissant aux préjugés bourgeois de sa famille, il a épousé la jeune fille qu’on lui destinait. Pendant ce temps, Perrinette a rencontré un brave ouvrier mais elle meurt et l’inimitié qui existait entre l’homme et l’enfant fait que le garçon, livré à lui-même, finit au bagne d’enfants. Libéré, Chrétien devient le complice d’un autre bandit et tue. La Cour, ébranlée par le réquisitoire-plaidoyer de l’avocat général condamne faiblement le jeune homme et celui-ci, à sa sortie de prison, part avec son père vers une vie nouvelle. (Fiche du film sur le site de la Fondation Pathé)
Notre avis : Le deuxième film réalisé par André Antoine, après Les Frères corses, est une adaptation d’un ouvrage de François Coppée (1842 - 1908) auteur alors illustre, publié en 1896 et qui fera l’objet d’une nouvelle version, signée Raymond Bernard, en 1937.
L’oeuvre, bien oubliée aujourd’hui, semble être un roman à thèse non exempt de misérabilisme et de pathos moralisateur. Ces aspects n’ont visiblement guère intéressé Antoine dont le film pâtit néanmoins, par moments, d’un scénario un brin schématique et démonstratif et des effets de manche appuyés de la plaidoirie de Romuald Joubé, théâtral dans son rôle d’avocat général maîtrisant parfaitement la rhétorique de l’apitoiement. Mais on peu considérer que cette grandiloquence (très contrôlée d’ailleurs) est en situation, d’autant que l’acteur y renonce complètement dans les retours en arrière où il apparaît au naturel, débarrassé du maquillage censé le vieillir.
- Zéphora Mossé dans Le coupable (Antoine 1917)
- René Roche dans Le coupable (André Antoine 1917)
Les autres acteurs sont tous d’une sobriété exemplaire et permettent aux personnages qu’ils interprètent d’exister pour eux-mêmes et de n’être pas de simples porte-paroles. Leur non-jeu est en parfaite cohérence avec une esthétique naturaliste, proche de celle des films de Capellani, qui pousse très loin le côté documentaire : figurants qui sont à l’évidence des passants à peine dirigés ; plans inutiles (les gamins qui jettent des cailloux dans le fleuve ; la pause cigarettes dans le pénitencier) ; variété des tons et des ambiances (la séquence assez drôle, dans les coulisses du Châtelet, de la diva qui perd une boucle d’oreille qu’on recherche frénétiquement à chaque baisser de rideau), réalisme crû dans la description d’un univers rude (la boutique de l’usurier ; la brodeuse qui doit rembourser le tissus tâché ; le beau-père pressé de se débarrasser de l’enfant sous l’oeil effaré du commissaire de police).
Certes la censure, particulièrement intraitable en ces années de guerre, n’a pas tout laissé passer et il manque dans la version restaurée de 1987 certains plans de la partie se déroulant dans la maison de redressement ainsi que la fin heureuse jugée immorale puisque qu’elle voit la libération de celui qui, en dépit de toutes les circonstance atténuantes, reste un meurtrier. La superbe photo, à la Nadar, magnifie avec un goût certain du détail pittoresque la beauté non idéalisée d’un Paris montré comme un espace consacré aux activités laborieuses (cheminées d’usines fumantes, activité intense sur la Seine et sur ses quais, circulation effrénée dans les rues) et où richesse et misère se côtoient (la scène dans le jardin des tuileries où des fillettes jettent aux oiseaux du pain que le jeune affamé s’empresse de ramasser).
- Romuald Joubé et Zéphora Mossé dans Le coupable
- Le coupable (André Antoine 1917)
Rien de tout cela n’est figé mais toujours pris dans le mouvement d’un film qui, bien loin d’être enserré ou étouffé par son message, respire merveilleusement malgré le hiératisme de certains plans (mais le découpage est serré et les angles de prise de vue étonnement variés).
C’est une vraie déclaration d’amour à la ville que ce Coupable dont la force dramatique n’a guère pris de rides et dont se dégagent les magnifiques et bouleversantes figures féminines jouées par la fragile Zéphora Mossé (dans le rôle de Perrinette Forgeat, la mère abandonnée) et la grande Sylvie (dans celui de la brodeuse Louise Rameaux).
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