Une femme dangereuse
Le 2 novembre 2011
Sophistiqué mais proche encore du cinéma des attractions, ce film du méconnu Camille de Morlhon tient parfaitement les promesses de son titre alléchant et programmatique.
- Réalisateur : Camille de Morlhon
- Acteurs : Jeanne Brindeau, Léontine Massart, Pierre Magnier, Camille Licenet
- Genre : Drame
- Durée : 00h47 mn
- Date de sortie : 2 mai 1913
- Plus d'informations : http://filmographie.fondation-jerom...
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– Production : Films Valetta
– Distribution : Pathé frères
Sophistiqué mais proche encore du cinéma des attractions, ce film du méconnu Camille de Morlhon tient parfaitement les promesses de son titre alléchant et programmatique.
L’argument : Au cours d’une répétition organisée au cercle royal Pierre de Brézeux, en sa qualité de membre de la commission des fêtes, rencontre pour la première fois Ida Bianca, célèbre par sa danse flamboyante. Inquiet de l’émotion étrange qu’il ressent auprès de cette charmeuse il essaie d’échapper à cette fascination. Lorsqu’il reçoit d’Ida un billet de rendez-vous, il écrit à Marthe, sa fiancée, pour l’avertir qu’une affaire urgente l’empêchera de lui rendre, ce jour-là, sa visite quotidienne. Mais il glisse par méprise la lettre d’Ida dans l’enveloppe destinée à Marthe. Attablés au Pavillon du Bois, Pierre et Ida devisent joyeusement lorsqu’ils voient arriver soudain Marthe et sa mère.
Marthe, indignée et douloureusement atteinte par la trahison de Pierre, refuse de revoir son fiancé. Pierre devient le jouet de la séduisante Ida. Mordu par la jalousie et définitivement esclave, il voit un toréador, le célèbre Nuovita, s’amouracher d’Ida, et celle-ci se faire un jeu d’affoler cette proie facile, pour mieux s’assurer le cœur de son amant. Nuovita, dans l’exaltation de sa passion, écrit à Ida que, si elle demeure inflexible, il se fera tuer dans sa lutte contre le taureau. Un bouquet de violettes à son corsage sera le signal d’espoir. Mais Pierre, qui a reçu la lettre en l’absence d’Ida, oublie la missive et cette négligence cause la mort de Nuovita qui, désespéré, se jette au-devant des terribles cornes.
Pierre et Ida, bouleversés par ce drame, comprenant, devant leur crime involontaire, la fragilité de leur passion, se séparent. Marthe ne tarde pas à tendre son front, en signe de pardon, à celui qu’elle n’a cessé d’aimer.
- La broyeuse de coeurs
Notre avis : Personnalité marquante du cinéma français des années 10, celles où Gaumont et Pathé dominaient le marché mondial, Camille de Morlhon (1869 – 1952) est, comme son collègue Georges Denola, un cinéaste largement oublié malgré les dizaines de films qu’il réalisa à partir de1908.
Pourtant son oeuvre abondante pourrait bien elle aussi mériter l’attention dont jouissent désormais celles de ses confrères, du très inégal Léonce Perret aux surprenants Jean Durand et Victorin Jasset, sans parler des grands maîtres Capellani et Feuillade.
Sorti à l’Omnia Pathé de Paris en mai 1913, cette Broyeuse de cœurs au titre programmatique, est une des innombrables collaborations entre Morlhon et l’actrice d’origine belge Léontine Massart (1885 - 1980) , active par ailleurs au Théâtre de l’Ambigu et au Théâtre Antoine. Cette diva à l’allure bon enfant incarne ici une des femmes fatales qui abondent dans la littérature et le cinéma de l’époque et dont l’exemple le plus fascinant est peut-être l’étonnante Mistinguett dans La glu de Capellani.
Le jeu plutôt limité de Léontine Massart n’a pas la modernité de celui de la Miss ou de l’immense Asta Nielsen mais la tranquille insolence avec laquelle son personnage poursuit des desseins dictés par la seule loi du caprice fait plaisir à voir et ses formes généreuses rendent extrêmement provocante, voire franchement obscène, la danse voluptueuse qu’elle exécute sur scène et qui affole le héros. On est bien là encore , malgré toutes les conventions d’usage, dans ce cinéma des attractions qui n’a pas oublié son origine foraine.
C’est ce côté brut, non policé, qui fait la force du métrage plus que l’habileté d’un scénario (écrit par Morlhon) qui, comme il se doit, use et abuse de rebondissements et de coïncidences fortuites : la fatale méprise de l’interversion des missives (à l’évidence un acte manqué), la panne de voiture entraînant des retrouvailles embarrassantes, l’oubli malencontreux de la lettre entraînant la mort du torero.
Le film témoigne d’une indéniable maîtrise technique et on sera sensible au soin dont ont fait l’objet photo, décors et costumes. Quant à la mise en scène, elle est fort élaborée et souvent inspirée : les plans d’ensemble, dans les grands cafés, au théâtre ou dans l’arène pendant la corrida, sont superbement animés et les extérieurs (la soirée au Pré Catelan ou les promenades dans la lumière de Pau et de ses environs) contribuent à donner une belle respiration à l’ensemble.
Sans être tout à fait un chef d’oeuvre, cette réjouissante Broyeuse de cœurs est une des jolies réussites de la période de transition entre le cinéma forain des origines et celui, beaucoup plus formaté, qui allait bientôt régner (presque) sans partage.
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