Notre avis : Ce roman est loufoque. Les personnages qu’il met en scène sont en effet aussi lunaires que l’histoire. Celle-ci se déroule aux États-Unis, en 1980. Llewellyn Jones (alias Rip Van Jones) paresse au bord de l’eau lorsqu’il rencontre Joe Bosco et Mary, sa sœur. Il réalise immédiatement que tous deux sont un peu fantasques (peut-être même fous), mais accepte finalement la proposition de Joe : il a besoin d’un représentant de commerce qui soit propre sur lui, intelligent et cultivé. Or, quoi de mieux qu’un Gallois adepte de littérature pour remplir ce rôle ? Llew, alors renommé Rip, devra donc vendre des papillons un peu partout aux États-Unis, tant pour impressionner son nouveau chef (et mentor) que pour parvenir à ses fins avec Mary, qui lui a donné un objectif à atteindre (écouler 250 boîtes entomologiques pour espérer la mettre dans son lit). Avant de se lancer sur les routes, Rip rencontre la famille Bosco en son entier : Edith, la mère, les deux chiens, mais aussi Elijah et Ceelee qui ont été recueillis et Isabelle, l’aînée de la fratrie. S’ensuit un road trip aux multiples péripéties, plus extravagantes les unes que les autres.
Étonnamment, l’histoire tient plutôt bien la route, malgré ces fantaisies diégétiques. La structure du roman permet au lecteur d’avoir une longueur d’avance sur les protagonistes, de savoir que le bagou de Joe ne le sauvera pas de manière systématique.

Les personnages ne sont pas vraiment attachants : Edith est colérique et grossière, Mary est aguicheuse et souvent boudeuse, Isabelle raisonnable à l’excès, Joe un peu trop excentrique bien que touchant, et le narrateur n’est pas plaisant. Il est prêt à tout pour arriver à ses fins, à l’égoïsme, au mensonge, camouflant sous une lourde couche de vernis son cœur qui n’est pas tendre. Paresseux et un peu rêveur, on ne l’apprécie pas vraiment – alors que c’est lui qui raconte et que nous avons donc accès à ses pensées les plus intimes.
On embarque pour leurs aventures sans un intérêt éminent, mais avec un peu de curiosité. Le style de Rhidian Brook (auteur de Dans la maison de l’autre, à l’origine du film Cœurs ennemis) est imagé et visuel : beaucoup de métaphores viennent illustrer le récit de son narrateur et l’histoire pourrait très bien être un film qui nous est projeté. La traduction est sans doute l’élément le plus gênant dans L’étrange histoire du collectionneur de papillons – pourtant Hélène Amalric est connue dans ce milieu, tant comme traductrice que comme auteure. Certaines phrases sont bancales, d’autres sonnent faux et quelques formulations sont vraiment maladroites, ce qui dérangera un lecteur un peu attentif.
Ce roman n’est donc pas inoubliable, mais plaisant malgré tout : il s’agit d’une jolie épopée, poétique et farfelue – peut-être un peu trop.