Coffret Capellani : rancoeur tenace
Le 1er décembre 2011
Le roman de Zola ramassé en 36 minutes dans ce chef-d’oeuvre de 1908 à la jeunesse inaltérable.
- Réalisateur : Albert Capellani
- Acteurs : Alexandre Arquillière, Jacques Grétillat , Eugénie Nau, Jacques Varennes, Catherine Fonteney
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 21 décembre 1908
- Plus d'informations : http://filmographie.fondation-jerom...
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– Durée : 36mn
Le roman de Zola ramassé en 36 minutes dans ce chef-d’oeuvre de 1908 à la jeunesse inaltérable.
L’argument : Gervaise a attendu Lantier toute la nuit, mais, lorsqu’il rentre au petit matin, il chasse sa femme en pleurs et lui demande de le laisser en paix. Elle prend son panier de linge et va au lavoir. Dès que Gervaise est partie, Lantier fait sa malle, rafle les derniers sous de Gervaise et s’en va malgré la présence de Coupeau, un voisin ouvrier zingueur, qui tente de le retenir. Au lavoir, Gervaise se trouve en face de Virginie qui la raille au sujet de son mari. Un gamin apporte un mot à Gervaise qui lit : J’en ai assez de ta jalousie. Je m’en vais. Ne t’en fais pas pour moi, j’ai déjà trouvé de la consolation. Lantier. Gervaise se retourne alors avec colère contre sa rivale et lui inflige une forte raclée.
Notre avis : Production prestigieuse de la Société cinématographique des auteurs et gens de lettres (SCAGL) pour Pathé frères, L’assommoir a été présenté, conjointement à L’Assassinat du Duc de Guise, au cours d’une grande soirée de Gala au Cirque d’Hiver de Paris le 21 décembre 1908. Avec ses 740 mètres de pellicule en trois bobines le film est considéré comme le premier film français de long métrage.
Malgré cette durée exceptionnelle pour l’époque l’adaptation d’Albert Capellani et Michel Carré simplifie considérablement l’intrigue du célèbre roman de Zola (1877), ramassée en une suite de tableaux qu’annoncent des cartons tels que : Fiançailles de Gervaise et de Copeau, 1872 ; Trois ans après : Virginie se venge ; Encore quatre ans après....
La modification principale tient à l’importance donnée au personnage de Virginie qui, poursuivant Gervaise d’une haine inextinguible, devient le véritable moteur de l’action : c’est elle qui provoque volontairement l’accident de Copeau en détachant la planche sur l’échafaudage puis cause sa mort en remplaçant la bouteille de vin par l’eau de vie que les médecins ont formellement interdite à l’ex-alcoolique.
Pourtant, contrairement au médiocre Gervaise de René Clément (1956), le film de Capellani a su conserver la force naturaliste de Zola grâce à l’audace de ses parti-pris esthétiques.
Les acteurs sont des célébrités venues du théâtre. Si Eugénie Nau en Gervaise a un peu trop tendance à lever les yeux au ciel pour exprimer son accablement et si Alexandre Arquillière (Copeau) fait sourire dans son grand numéro de délirium tremens, la plupart de leurs partenaires étonnent par la précision et la sobriété de leur jeu. Le jeu de Catherine Fonteney, Virginie machiavélique, observant, souvent un peu à l’écart des autres, l’effet de ses manigances, est particulièrement moderne.
Le découpage des scènes et le montage sont d’une grande efficacité dramatique, notamment dans la scène où Virginie détache la planche sur l’échafaudage pendant que Copeau prend sa pause-déjeuner : Griffith ne fera pas mieux. Mais Cappellani sait aussi laisser respirer l’image sans la visser trop étroitement au drame : Lantier (Jacques Grétillat) trainant devant la blanchisserie pendant la fête d’anniversaire, puis repartant pour revenir plus tard.
Les décors d’intérieurs ne donnent que rarement l’impression d’être de carton pâte et frappent au contraire par le souci d’exactitude documentaire et leur matérialité, mais ce sont surtout les extérieurs qui donnent au film un formidable cachet d’authenticité : terrasse d’un café en angle, guinguette de faubourgs, banc public devant la falaise des Buttes Chaumont.
La caméra reste fixe mais le sens du cadrage et de l’animation dans le plan créent une impression de mobilité constante : diagonale du trottoir permettant l’entrée dans le champ d’un cheval tirant une calèche qu’on ne verra qu’en amorce ; merveilleuse utilisation de la profondeur dans la séquence de la guinguette avec les convives qui arrivent par le fond ou les danseurs qui s’éloignent puis reviennent par la gauche ; chorégraphie centrifuge puis centripète de la mêlée dans le lavoir.
C’est un véritable choc esthétique que provoque la vision de ce ce chef-d’oeuvre resté jeune. L’exceptionnelle qualité de la copie figurant dans l’indispensable coffret Capellani que vient de publier Pathé (le 11 mai 2011) permet de le voir
dans des conditions presque idéales.
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