Les périls de Lucy
Le 5 décembre 2011
Un joyeux feu d’artifice parodique et totalement débridé qui révèle une facette négligée du prolifique Mihály Kertész alias Michael Curtiz.
- Réalisateur : Michael Curtiz
- Acteurs : Lucy Doraine, Alfons Fryland, Max Devrient, Jean Ducret, Mathilde Danegger, Paul Askonas
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Action, Mélodrame, Film muet
- Nationalité : Autrichien
- Durée : 1h15mn
- Titre original : Wege des Schreckens
- Plus d'informations : http://www.filmarchiv.at/rte/upload...
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– Sortie en Autriche : 11 novembre 1921
Un joyeux feu d’artifice parodique et totalement débridé qui révèle une facette négligée du prolifique Mihály Kertész alias Michael Curtiz.
L’argument : Edward Stephenson, fils d’un riche industriel, s’éprend de Maud, une modeste employée de maison. Maud est renvoyée et retourne vivre dans la maison familiale où son frère, George, vit aux crochets de leur mère...
Notre avis : Avant d’entamer, en 1926, la carrière hollywoodienne que l’on sait sous le nom de Michael Curtiz (Casablanca , The sea hawk et tant d’autres) Kertész Mihály (Manó Kertész Kaminer) s’était fait une solide réputation de cinéaste en Europe, notamment grâce aux spectaculaires superproductions, telles que Sodom und Gomorrha (1922) ou Die Sklavenkönigin (1924), qu’il avait dirigées pour la Sascha-Film de Vienne, où il s’était installé en 1919.
Auparavant il avait été acteur de théâtre et de cinéma, assistant d’August Blom sur le tournage d’Atlantis (1913) au Danemark et réalisateur de nombreux films à Budapest (1912-1919).
On connait mal cette première partie de carrière, apparemment aussi éclectique que la seconde. Si on garde un assez bon souvenir de Der junge Medardus (1923) malgré le côté empesé et solennel de la reconstitution historique de l’époque napoléonienne, le quelque peu indigeste Sodom und Gomorrha, dont ne subsiste qu’une version très incomplète, ou le trop lisse Das Spielzeug von Paris - Célimène poupée de Montmartre (1926) témoignent d’un métier indiscutable mais pas d’une personnalité de cinéaste très affirmée.
La découverte du trépidant Wege des Schreckens alias Labyrinth des Schreckens est donc une excellente surprise. Visiblement destiné en premier lieu à offrir un écrin de diva à la star hongroise Lucy Doraine, alors épouse de Kertesz, cette bande d’une heure et quart passe allègrement en revue tous les genres en vogue de l’époque : mélodrame larmoyant, critique sociale, serial à rebondissements façon Feuillade, drame mondain sophistiqué, film catastrophe et j’en passe, le tout sur le mode de la citation amusée : l’héroine dépenaillée débarquant au milieu de la garden party costumée est immédiatement sacrée reine du bal parce qu’on trouve très réussi son déguisement de Mary Pickford.
- Wege des Schreckens (1921)
Car le ton, annoncé par un titre en forme de clin d’oeil, est clairement parodique et le spectateur est invité à prendre au second degré les péripéties rocambolesques et les innombrables rebondissements du récit, plus invraisemblables les uns que les autres. Le jeu joyeusement extraverti, proche de la pantomime, de Lucy Doraine fait oublier ses évidentes limites d’actrice. La direction d’acteur ne sera d’ailleurs jamais le point fort de Kertesz/Curtiz. Ici seul Jean Ducret parvient à donner une certaine épaisseur et un charme canaille au personnage du frère mauvais garçon et totalement irresponsable qui vit au dépends de sa famille, triche aux cartes dans des lieux mal famés, vole et j’en passe, tout en suscitant une sympathie désarmante. Les autres sont de simples marionnettes.
L’ensemble, très m’as-tu vu ? ne porte pas à conséquence mais se laisse regarder avec un vrai plaisir. L’impression générale est celle d’une suite de scènes à faire exécutées avec un brio et un goût de l’excès tout à fait réjouissants qui culminent dans la séquence, très spectaculaire, de l’incendie du train et dans un final ahurissant, lorsque le frère fugitif se réfugie sur une cheminée d’usine (filmée d’en haut) que la police fait s’écrouler à coups de canon !
Un talent affirmé pour la composition de l’image (la stupéfiante séquence du rêve dans le lit d’hôpital après l’accident) et le sens du détail qui donne vie au tableau (le garçon qu’on envoie chercher de la bière et qui jette un oeil goguenard sur le sombre drame familial en cours) permettent cependant au film de dépasser le niveau de la simple parodie pour frôler le grand cinéma.
Bref pas un chef-d’oeuvre mais une découverte sympathique et franchement jubilatoire qui nuance le portrait d’un cinéaste pas vraiment réputé pour sa légèreté.
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