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Le 4 février 2004
Une voix neuve et singulière qui se joue des classifications rassurantes...
Sombre et limpide, dense et évanescent, bref terriblement troublant, le second roman de Sandrine Rotil-Tiefenbach confirme le signe particulier de cette voix neuve, singulière : une absolue liberté qui se joue des classifications rassurantes...
Alice est une jeune femme ordinaire. Tout en elle est normal, convenu jusqu’à la transparence. Est-elle lasse de cette banalité, de cette absence de relief qui la livrent à toutes les agressions du monde vif ? Est-ce la raison pour laquelle elle décide un jour de s’effacer ? Oh ! pas en se faisant plus discrète encore, en se fondant plus profondément dans la multitude anonyme d’une ville toute de grisaille et de vacarme. Non, pour disparaître - se délivrer en se livrant au vide ? -, Alice adopte une méthode radicale : elle ôte sa peau. "Le plus dur c’est de se lancer", dit-elle sans abandonner ce ton distancié, désincarné qui la caractérise. C’est peut-être ce qui glace le plus dans ce roman calme et dément : la voix jamais ne se hausse. La panique, quand elle gagne, s’exprime à travers des images aux précisions implacables ; même au paroxysme de l’horreur - car après la peau pelée "comme une orange" pour moins étouffer, c’est tout ce qui fait Alice la vivante, la charnelle qui va se désagréger sous ses yeux-réceptacles, sous les nôtres brûlant par moment de se fermer.
On poursuit pourtant cette lecture, cette épreuve jusqu’aux derniers maux. Il ne s’agit là ni de voyeurisme, ni de perversion. C’est qu’Alice en voie de désagrégation n’est pas un monstre que l’on pourrait renvoyer à ses limbes sombres. Elle n’est pas étrangère. Seule sa manière de dire est étrange. Cette créature comme postée en observation de sa décrépitude n’est qu’un vous ou moi prenant littéralement ses rêves - et ses cauchemars - pour la réalité. Une fois cette frontière-là franchie, qui existe par la seule force de nos "raisons sociales", on ne peut que se perdre. Les repères sont lâchés un à un tels des ballons gonflés d’air. Le monde devient illisible hors des limites de sa propre structure, de son propre squelette mis à nu.
Sandrine Rotil-Tiefenbach convoque les mots justes, affreusement beaux, pour relater ce voyage dont Alice ne reviendra pas. Nous y laisserons quelques lambeaux d’âme...
Sandrine Rotil-Tiefenbach, J’air, Michalon, 2004, 128 pages, 11 €
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