Le 23 octobre 2024
- Scénariste : Alix Garin>
- Dessinateur : Alix Garin
- Genre : Autobiographie
- Editeur : Le Lombard
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 6 septembre 2024
Pour son deuxième album, Alix Garin livre une autobiographie saisissante sur la reconquête de son corps après avoir souffert de vaginisme.
Résumé : Tout semble sourire à Alix Garin : à 21 ans, elle achève ses études, déménage avec son petit ami Lucas, et signe un premier contrat d’édition pour un album, Ne m’oublie pas, qui s’avère un franc succès. Mais dans l’intimité de sa relation avec Lucas, soudain, quelque chose cloche : un jour qu’elle fait l’amour avec son compagnon, elle ressent une terrible douleur. Le désir cède la place à la peur et à la crainte de décevoir son partenaire. Après de multiples consultations, un diagnostic tombe : Alix est atteinte de vaginisme, une contraction involontaire des muscles du plancher pelvien qui entourent le vagin, qui rend la pénétration extrêmement douloureuse. Confrontée à maladie méconnue qui affecte son couple et son désir, Alix ne baisse pas les bras : elle cherche à en comprendre les causes, et entame un long chemin vers la guérison, qui l’entraîne vers des sentiers inattendus.
Critique : Alix Garin sidère par sa maturité narrative et graphique. À seulement 27 ans, la jeune autrice repérée au festival Quai des Bulles et déjà remarquée par la critique pour Ne m’oublie pas – une belle histoire centrée sur la relation entre une jeune femme et sa grand-mère malade d’Alzheimer – publie cette fois une autobiographie qui prend la forme d’une émancipation intime – contre des injonctions sociales, contre les réminiscences d’un passé enfoui – et d’un combat pour se réapproprier son propre désir. Alix Garin se met (littéralement) à nu et aborde l’autobiographie, genre désormais bien balisé de la bande dessinée, par un versant difficile : l’exploration d’une maladie, le vaginisme, qu’elle contribue à mieux faire connaître. Le sujet de la maladie constitue d’ailleurs le principal point commun avec Ne m’oublie pas, avec une oscillation constante entre la disparition (d’un être aimé, du désir) et la vie.
Le récit mêle avec beaucoup de finesse une poésie essentiellement incarnée par le graphisme – les choix de mise en couleur, les multiples planches muettes où l’autrice se représente en train de danser, de s’observer, de désirer – et une fureur de vivre qui transpire de la narration. La sidération face au diagnostic laisse place à une volonté de comprendre, qui devient in fine une quête de soi menée parfois avec maladresse (Alix tâtonne, explore différentes voies, s’interroge), mais toujours avec une rage qui témoigne des pulsions de vie de l’autrice. Si Impénétrable est un récit profondément intime, c’est peut-être d’abord une l’histoire à portée universelle de la réappropriation de soi à travers un questionnement sur le désir.
Impénétrable est également une belle histoire d’amour : il a sans doute fallu du courage à Alix Garin pour représenter ses émotions et l’évolution de sa relation avec Lucas, qui soutient sa partenaire tout au long de sa quête, sans culpabilisation, et en dépit de ses propres failles. Leur relation survit à la maladie d’Alix et, d’une certaine manière, se renforce face à l’épreuve. L’autrice tire de cet amour une force et une énergie à toute épreuve et le récit rend un bel hommage à son compagnon de vie. L’exploration de cette relation facilite l’identification de tous les lecteurs, et contribue à rendre lumineux une histoire qui aborde des sujets difficiles.
Sur le plan graphique, l’album repose sur un dessin qui emprunte au style cartoon pour la représentation des personnages – des visages ronds et démonstratifs –, sur l’inventivité d’un découpage très aéré qui laisse toute sa place à l’expression des émotions et, enfin sur l’expressivité des aplats de couleurs. Chez Alix Garin, la couleur prend une forte dimension narrative : le feu orange représente le désir, le noir qui entoure le personnage symbole les angoisses et les injonctions… Cette recherche sur la couleur constitue le vrai point fort graphique de l’album.
La mise en scène graphique des émotions de l’autrice contribue à l’effet de sincérité qui transparaît d’Impénétrable, où l’autrice ne cache pas ses failles – sa consommation de drogues, par exemple – et ses doutes lorsqu’elle entame une série de consultations médicales qui s’apparente à un parcours du combattant.
Autobiographie lumineuse en dépit de son sujet difficile, Impénétrable est un album vibrant qui met en scène une autrice en quête d’émancipation. Une lecture intense, graphiquement très réussi, à la portée universelle.
304 pages – 29,90 €
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