Mère patrie ?
Le 14 octobre 2014
Une saison 3 pour le moins décriée... et pourtant courageuse dans bon nombre de décisions qu’elle prend. Accusée pour refus d’obtempérer ? Accusée pour son refus de caresser le public dans le sens du poil ?
- Réalisateurs : Clark Johnson - Divers
- Genre : Drame, Thriller, Espionnage
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Twentieth Century Fox Home Entertainment
- Durée : 12 X 55 minutes
L'a vu
Veut le voir
Une saison 3 courageuse qui, à l’image de ses protagonistes, n’a aucune latitude pour les alternatives consensuelles.
- © Showtime Networks Inc.
- © Showtime Networks Inc.
L’argument : Alors que tout semblait s’arranger pour nos amants Carrie Mathison et Nicholas Brody, une bombe explose au cœur de la CIA, décimant une bonne partie de l’organisation et de ses employés. Brody, présent sur les lieux, est le coupable tout désigné. La bombe se trouvait en effet dans le coffre de sa voiture et surtout, sa vidéo revendiquant un attentat refait surface et se retrouve diffusée à la télévision. Carrie, toujours persuadée de l’innocence de son marines bien-aimé va l’aider à s’échapper et l’envoie en exil en Alaska... Comment vont-ils se retrouver ? Brody va-t-il être innocenté ? Et surtout, comment Carrie va-t-elle couvrir la fuite de celui qui est désormais considéré comme l’ennemi public numéro 1, face à une CIA "mutilée" mais en état d’alerte maximum ?
- © Showtime Networks Inc.
- © Showtime Networks Inc.
Notre avis : Dire que la troisième saison de Homeland a été malmenée serait un euphémisme. C’est d’abord la mort d’Henri Bromell qui ébranla le développement d’une série dont il était, l’air de rien, l’un des piliers de l’équipe scénaristique. Dans la foulée, vint le départ pour le moins flou de Meredith Stiehm, habituée des séries TV (Notamment Cold Case), plusieurs fois récompensée pour son travail de scénariste chevronnée. C’est alors une équipe amputée, et nonobstant tenue de livrer les réalisations en temps et en heure, qui va s’activer pour que, comme à l’écran, les choses continuent d’avancer. Comme le scandait Claire Danes à l’issue de son sacre aux Emmy Awards en tant que Meilleure actrice dans une série dramatique : "C’est un peu triste cette saison... Il y a quelque chose de mélancolique." Et c’est effectivement comme si les méandres de la production atteignaient jusqu’à la diégèse même de leur création, insufflant sur cette dernière un sentiment de désespoir et d’asthénie à ne considérer en aucun cas comme de l’apitoiement, mais plutôt comme le reflet une certaine noirceur du monde de l’espionnage. Particulièrement à l’heure de la disparition de l’être humain au profit des machines de guerre moderne (thème que Homeland partage d’ailleurs avec l’excellent 24 Heures chrono-Live another day), les équipes vont rediriger leurs objectifs vers des personnages sacrifiés au profit de "l’image".
- © Showtime Networks Inc.
- © Showtime Networks Inc.
Le plus gros reproche formulé à l’encontre de cette nouvelle aventure de douze épisodes vise de supposées lacunes scénaristiques. Pourtant, une fois encore comme pour 24 heures chrono, c’est avant tout par des choix de réalisation que la série véhicule son message. Là où 24 joue pleinement d’une temporalité en temps réel, qu’on peut parfois qualifier d’hitchcockienne, qui oppose ses personnages à un hors champ autant pesant pour le spectateur que pour ses protagonistes, Homeland opte pour la carte du classicisme. Ce classicisme n’est à aucun moment dépréciatif, il rappelle précisément que plusieurs traitements sont plausibles quant au développement d’une seule et même problématique. Quand dans 24 le cadre est chahuté et nerveux, la caméra de Homeland est fixe et scrutatrice. Là où le montage de 24 est anfractueux, celui de Homeland est modéré (ce qui n’empêche en rien certaines ruptures travaillant la soudaineté des conflits). Si dans la première des créations ce chahut de la mise en image travaille l’idée d’une urgence de réaction post-traumatique à rattacher au 11 septembre, elle évoque dans l’autre la vision du travail quotidien d’hommes et de femmes devant convoiter des solutions à moyen terme tout en combattant des instances administratives aux impertinences tenaces.
- © Showtime Networks Inc.
- © Showtime Networks Inc.
En l’occurrence, les intentions de replacer l’humain au centre de problématiques géo-politiques contemporaines sont véhiculées par une galerie de personnages hauts en couleur, admirablement campés et caractérisés. Alors que tout le monde se pâme sur les performances de Claires Danes et Damian Lewis (effectivement impeccables), c’est dans la quasi-indifférence qu’un acteur, qu’on cantonne bien trop aux seconds rôles, porte cette troisième saison vers une qualité formelle de son interprétation fine et pointue. Le personnage de Saul Berenson, évoquant littéralement par ses dialogues le besoin de maintenir l’Homme au centre du renseignement, est de ceux qui marquent l’histoire de ce que l’on nomme communément les seconds rôles. Au vu de cette présence de Mandy Patinkin pleinement habitée, nul doute que l’acteur s’implique à cent pour cent dans la détermination du personnage. Malheureusement bien trop rare au cinéma, excepté quelques apparitions notables dans Dick Tracy et Princess Bride, Patinkin livre plus que jamais une performance préoccupée, il se laisse aller à un jeu tout en intériorité mélancolique, d’un calme plein de sagesse rompu par quelques fulgurances saisissantes, dont les exactions imposées par un "travail" hors-normes sont crédibles et portent même les ambitions du récit vers le haut. Il se paye même le luxe de véhiculer certaines des ambitions scénaristiques pourtant décriées et de crédibiliser certains coups de théâtre, soit dit en passant jubilatoires. Alors certes, il est indéniable que la série prend un tout autre virage dans cette saison qu’on aurait pu croire la dernière. Mais ce qui est presque amusant, c’est que la mauvaise foi de certaines critiques, en quête d’un ralliement mercantile à l’opinion générale, témoigne d’une étrange démission intellectuelle justement évoquée par la série elle-même. Comment, effectivement, se laisser aller à des commentaires aussi anecdotiques que « La CIA n’a-t-elle pas des caméras partout, spécialement dans le hall d’entrée ? Personne ne verra ce qu’elle a fait ? Ne devra-t-elle pas en subir les conséquences » ? pour évoquer une fin de saison poignante ? Comment ne pas déceler ici la conclusion hautement ironique et symbolique du geste de Carrie. A quoi s’attendre en tant que spectateur ? Au débarquement d’une unité d’intervention pour cause de marqueur sur les murs ? Bien évidemment que le tag final sera effacé, mais il ne faut pas oublier la nature même d’un plan figuratif et de la fonction de cette judicieuse ellipse de bilan. Au vu d’un tel nivellement par le bas, on ne peut qu’être heureux de saluer une série, certes imparfaite, mais dont bon nombre de détracteurs rappelle les attitudes du sénateur inquisiteur de cette saison. Rien que pour son propos, presque subversif, qui combat l’avis général (l’équipe créatrice dut batailler auprès du diffuseur Showtime pour imposer le final) la série Homeland vaut toujours le coup d’être soutenue !
Le blu-ray
Les suppléments :
Comme habituellement, les suppléments sont maigres. Ils se cantonnent à quelques informations qui restent trop en surface.
– Disques 1 à 3 :
Scènes inédites.
– Disque 1 :
"Recréer la Tour de David" (07:33). Un reportage sympathique (mais toujours survolé) sur la création de l’immense Tour de Caracas.
– Disque 3 :
"Héros malgré lui". Les commentaires audio de Damian Lewis, Alex Gansa et le monteur Joe Hobeck... qui ne sont même pas sous-titrés !
"Le tournage du dernier épisode de la saison (13:06)" : Probablement le bonus le plus intéressant. Un (trop court) making-of qui évoque, entre autre, la scénarisation.
L’image :
Une image au top, qui bénéficie qu’une compression complètement imperceptible et de contrastes réellement excellents.
Le son :
La piste anglaise est en DTS-HD Master Audio 5.1. La version française est pour sa part en DTS 5.1 mi-débit, comme pour les premières saison. Les deux pistes sont néanmoins précises et parfaitement réparties sur les canaux. On peut éventuellement évoquer des basses un peu en retrait lors des scènes d’action mais globalement, le tout est plus qu’agréable.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.