L’aigri-vain
Le 21 juin 2005
Enfermé dans sa forteresse, un écrivain pourfend auteurs et monde contemporains. Énervant.
- Auteur : Richard Millet
- Editeur : Gallimard
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Se taper 170 pages d’entretien avec un auteur dont on n’a jamais rien lu peut s’avérer pour le moins fatiguant. Pas avec Harcèlement littéraire, discussion entre deux professeurs de lettres et Richard Millet. Un ouvrage profondément... énervant.
Évidemment, avoir lu du Millet doit offrir à Harcèlement littéraire davantage de sens. Mais n’en avoir rien lu ne doit pas empêcher d’en parler. Surtout pas avec un écrivain qui clame son dégoût de la littérature d’aujourd’hui et son "rythme autoroutier" alors même qu’il ne lit "presque plus" ses contemporains... qu’il édite pourtant en étant membre du comité de lecture de Gallimard. Mais sans doute est-ce cet emploi auto-flagellant qui lui permet de "s’insurger contre la plupart des romans de notre époque" qu’il lit donc, ou qu’il ne lit pas, après tout on s’en fout mais puisqu’on s’est lancé dans la critique de ce bouquin allons jusqu’au bout.
D’autant que, pour être franc, il y a du bon. Lorsque, par exemple, l’auteur parle de l’engagement du lecteur face à ses phrases à la construction complexe (d’où le titre du livre). Ou quand il dit joliment qu’"écrire revient à déjouer tous les plans". On le rejoint aussi quand il s’interroge, trop brièvement, sur la propension - délibérée ou non - qu’a le libéralisme économique à rendre les gens moins cultivés.
Mais il y a le reste. Comme ces envolées à l’emporte-pièce genre "La petite-bourgeoisie est le rêve de tous". Comme cette haine de Mai-68 ou ces attaques contre le système scolaire, l’école, devenue "un lieu de non-transmission, de non-savoir", étant rendue coupable avec la déchristianisation de la société du déclin de l’Occident. Agaçante aussi cette manière de se placer par "nécessité" en dehors du monde (Millet rejette les médias, les partis, n’a jamais voté) et de se poser en donneur de leçons.
Reclus dans "une forteresse" et non une tour d’ivoire, Millet, comme l’écrit Thierry Cecille dans sa préface ? L’aigreur des propos fait penser plutôt à un petit château.
Richard Millet, Harcèlement littéraire. Entretiens avec Delphine Descaves et Thierry Cecille, Gallimard, 2005, 200 pages, 16,90 €
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