La chevaleresse - Elsa Bordier, Titouan Beaulin - la chronique BD

Critique : Il est étrange de voir comment réminiscences résonnent au cœur d’une lecture, avec un simple nom ou un thème qui renvoient à quelque chose de plus grand. Pour La Chevaleresse, c’est le second tome des Tours de Bois Maury – intitulé justement Héloïse – qui nous est revenu. Même si l’héroïne d’Hermann avec son désir de vengeance, son arbalète et sa tragédie personnelle est évidemment éloignée de celle d’Elsa Bordier, les deux personnages partagent cette force féminine qui manque à une période de l’histoire où la religion chrétienne a cherché à la rabaisser voire l’effacer. Oui, cette œuvre où une femme devient chevaleresse est bien de fiction, rappelant aussi Brienne du Trône de Fer. L’Héloïse d’Elsa Bordier rappelle en creux les oublis d’historiens qui ont bien des fois omis de mentionner des femmes de pouvoir, ou encore les combattantes qui ont défilé dans certains royaumes... Bref, s’il faut naturellement lire cet album pour son message féministe, il n’empêche qu’il forge une solide intrigue et fait la part belle à de nombreuses émotions, de la guerre jusqu’à la vision des guérisseuses.

© Jungle / Beaulin

Pour épauler ce scénario impeccable, le dessin de Titouan Beaulin vient s’ajouter comme un aveu de faiblesse. C’est de manière timide que les différents protagonistes, deux femmes et un homme (dessinateur) s’affirment, et le dessin ne vient pas contredire cette volonté. Leurs traits ne semblent pas figés, leurs corps ne sont pas sculptés, de même que les décors qui apparaissent mouvants. C’est un style qui ne recherche pas la sérénité mais bien une apparence de fragilité.

© Jungle / Beaulin

Excellente histoire d’aventure au Moyen-Âge et message féministe exemplaire, La Chevaleresse est un récit qui a donc deux qualités bien trempées, à l’image de son héroïne.