Peau d’homme
Le 27 mai 2004
Choc des idéologies, poids de la faute, haine de soi... Bref, violence à tous les étages dans une famille de tanneurs qui cultive le secret et l’enfermement.
- Auteur : Virginie Lou
- Editeur : Actes Sud
- Genre : Roman & fiction
- Nationalité : Française
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Louise Tulaine, revenue s’installer sur les lieux isolés d’une enfance livrée aux tourments, découvre une peau humaine dissimulée entre deux cloisons. Elle sait aussitôt qui, entre tous, est l’auteur de ce travail atroce et parfait. Elle sait aussi qui en fut la victime. Seul son grand-père, dit Le Vieux, était en effet capable d’exécuter un tel ouvrage ; et la silhouette vide crucifiée sur le mur appartient sans aucun doute possible au père disparu trente ans plus tôt de Victor, l’homme qu’aime Louise. Commence alors pour elle, et pour nous qui nous trouvons comme agrippés à ses pensées, une déambulation vertigineuse à travers un passé trop lourd ; ce passé emblématique d’un vingtième siècle au mille affrontements.
Le monde selon les Tulaine, tanneurs de père en fils depuis le XVIIe siècle, est celui du cloisonnement, du secret. Cloisonnement des idées sans aucune possibilité d’échange entre celles du Vieux - conservateur, individualiste, arc-bouté sur ses valeurs ancestrales - et celles de la génération suivante hantée par la barbarie nazie, et qui a plongé à corps perdu dans l’utopie communiste. Cloisonnement des sexes, car ici hommes et femmes jamais ne se rejoignent ailleurs que dans la violence des conflits. Cloisonnement de la folie, de la froideur, de l’incompréhension. Cloisonnement des murs, enfin, où demeura cachée à quelques centimètres des vivants la peau tannée d’un homme qui voulait dire le vrai.
Louise, la narratrice héritière - bien malgré elle - des non-dits, des guerres jamais finies, d’une certaine tare aussi qui peu à peu l’aveugle (l’enferme encore) est comme privée d’une existence propre. Elle est un réceptacle pour les douleurs du monde et celles de ses proches, pour la cruelle indifférence de sa mère, pour la duplicité des hommes. Elle est une peau, tendue à craquer sur toute cette laideur que seule la nature par instants trop rares atténue.
Il faut lire son chant parfois insoutenable de lucidité noire ; que le lecteur au moins, en recueillant ses confidences, son désespoir, brise la glace qui l’enserre. Et le silence enfin sera rompu...
Virginie Lou, Guerres froides, Actes Sud, 2004, 184 pages, 17 €
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