Le 24 décembre 2021
- Scénariste : Théa Rojzman>
- Dessinateur : Sandrine Revel
- Coloriste : Sandrine Revel
- Genre : Drame, Fantastique, Chronique sociale, Conte, Roman graphique, Politique, Société, Poésie
- Editeur : Glénat
- Famille : BD Franco-belge, Roman graphique
- Date de sortie : 2 juin 2021
Ce conte, rude et fort, parle des violences sexuelles faites aux enfants en entremêlant éléments factuels et métaphores, crudité et poésie.
Résumé : Une île. Lors d’un mariage, le neveu de la mariée est surpris en train de fumer par un membre de sa famille. L’homme lui assure qu’il ne dira rien si l’enfant le suit. Le garçon obéit et en ressort différent, cassé. Il en ira également ainsi d’une nièce du même homme, ce dernier étant par ailleurs impliqué en politique. Sur l’île, une usine nommée Grand silence absorbe et retient les paroles des êtres violentés, en particulier celles des enfants. Une institutrice abusée dans sa jeunesse décide d’agir.
Grand silence parle des violences faites aux enfants et plus précisément de celles sexuelles. La forme choisie par Théa Rojzman est celle du conte - elle s’en explique dans une postface particulièrement éclairante. Au commencement de la lecture, il est possible de trouver ce parti pris fort, mais quelque peu schématique. Cela disparaît au fil des pages tant le propos est précis, affirmé et - surtout ? - animé par des directions artistiques décisives.
Théa Rojzman - Sandrine Revel / Glénat
La forme du conte permet d’entremêler éléments factuels et métaphoriques, descriptions de situations et touches poétiques. Les bulles contenant les dialogues des enfants sont le plus souvent laissées blanches, sans texte, suggérant la non prise en compte de leur parole. D’autres bulles, comme celles de l’institutrice lanceuse d’alerte, contiennent du texte tout juste ébauché et barré, soulignant l’aspect inintelligible de ces paroles pour qui les entend. Cette procédure, essentielle, porte ce qui est au centre de cet album : la libération de la parole et, ainsi, la fin du « grand silence ». Faire du lecteur le témoin de ces bulles singulières souligne que cette libération ne peut s’effectuer que si ces paroles sont écoutées et considérées.
Théa Rojzman - Sandrine Revel / Glénat
Un élément peut paraître anecdotique et ne l’est certainement pas : l’institutrice au centre du récit est en fauteuil roulant - pour une raison précisée au cours de l’histoire - et sa collègue a la peau mate. Cela permet de constater que rares sont les bandes dessinées sortant leurs personnages de représentations uniformes et/ou conformistes.
Théa Rojzman - Sandrine Revel / Glénat
Comme à l’accoutumée, le dessin de Sandrine Revel est doux par son style et d’une grande force - de frappe - par ses représentations. Depuis Le 11e jour (Delcourt, 2002), cette autrice essentielle met ce dessin somptueux, fin et subtil au service de récits sociaux et politiques importants, jouant fréquemment sur le décalage entre le trait semi-réaliste, la richesse des couleurs et la violence du propos. Il en va ainsi ici, ce d’autant plus que certaines couleurs (le bleu, le rouge et le violet) sont investies d’une signification particulière.
Théa Rojzman - Sandrine Revel / Glénat
La lecture de Grand silence est éprouvante tant tous les aspects problématiques du sujet sont abordés en profondeur. On en sort groggy, mais enrichi et combatif.
Enfin, et nous nous en réjouissons, cet album est sélectionné pour le Prix des Lycées 2022 du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême.
Théa Rojzman - Sandrine Revel / Glénat
128 pages - 23,00 €
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Galerie Photos
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