Kimono et veston blanc
Le 7 mai 2012
Sous les dehors pimpants d’une superproduction en scope couleurs, ce portrait de famille choral est un grand Naruse : vif, drôle, implacable, poignant.
- Réalisateur : Mikio Naruse
- Acteurs : Akira Takarada, Masayuki Mori, Chishū Ryū, Setsuko Hara, Ken Uehara, Hideko Takamine, Haruko Sugimura, Chieko Nakakita, Daisuke Katō, Aiko Mimasu, Reiko Dan, Keiko Awaji, Mitsuko Kusabue, Hiroshi Koizumi, Tatsuya Nakadai
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Durée : 2h01mn
- Titre original : 娘 ・妻・ 母 (musume tsuma haha)
- Plus d'informations : http://www.mcjp.fr/francais/cinema/...
- Festival : Les 15 ans de la MCJP
L'a vu
Veut le voir
– Sortie au Japon : 28 mai 1960
Sous les dehors pimpants d’une superproduction en Tohoscope couleurs, ce portrait de famille choral est un grand Naruse : vif, drôle, implacable, poignant.
- Musume, tsuma, haha (Naruse 1960)
L’argument : Dans la banlieue de Tokyo, trois générations vivent sous le même toit dans la maison familiale des Sakashini : la mère Aki, qui va avoir soixante ans, le fils aîné, Yuichiro, la dernière née, Haruko, ainsi que Kazuko, l’épouse de Yuichiro et leur tout jeune fils.
La fille aînée, Sanae, revient vivre auprès de sa mère après la mort accidentelle de son mari, qui appartenait à la haute bourgeoisie.
Pour aider Tetsumoto, un oncle de sa femme, Yuichiro a hypothéqué la maison familiale sans prévenir sa mère et demandé à Sanae, qui a touché une somme importante grâce à l’assurance-vie de son mari, de lui prêter 500 000 yens.
Kaoru, la deuxième fille, ne supporte plus de vivre avec sa belle mère et demande elle aussi de l’argent à sa soeur pour acheter un appartement.
Une amie de Sanae arrange une rencontre avec Gojo, un riche homme d’affaires de Kyoto, mais la belle veuve semble peu soucieuse de se remarier. Elle rencontre un jeune viticulteur, Kuroji, et une idylle s’ébauche.
- Musume, tsuma, haha (1960)
Yuichiro découvre que l’oncle de sa femme a fait faillite et que l’argent qu’il lui a prêté est perdu. Il est obligé de révéler à ses frères et soeurs qu’il a hypothéqué la maison et de leur demander leur aide pour payer ses dettes.
La vente de la maison est décidée à l’issue d’une réunion familiale houleuse. Les autres acceptant de leur prêter leur part du produit de la vente, Yuichiro et sa femme veulent continuer à prendre en charge Aki, la grand-mère, mais Sanae décide d’accepter, à contre coeur, la proposition de mariage de Gojo et d’emmener sa mère à Osaka.Elle annonce à Kuroki, l’homme qu’elle aime vraiment, qu’elle ne le verra plus.
Quand le facteur lui remet le courrier, Kazuko découvre une lettre en provenance d’une maison de retraite et adressée à Aki.
- Keiko Awaji, AkiraTakarada, Tatsuya Nakadai et Setsuko Hara dans Musume, tsuma, haha (Naruse 1960)
Notre avis : Le titre de cette oeuvre chorale, opulente superproduction au casting impressionnant, ne laisse planer aucun doute : Musume, tsuma, haha (Fille, épouse et mère) est ce qu’il est convenu d’appeler un film de femmes.
C’est en effet au sort peu enviable de ses héroïnes que s’attache avant tout le scénario, étonnamment serré et limpide malgré sa complexité, de ce portrait d’une famille de la classe moyenne dans une société japonaise en pleine transformation à l’aube des années 60.
Trois d’entre elles sont privilégiées et donnent à Naruse l’occasion de démontrer une fois de plus avec quel génie il sait révéler à elles-mêmes les actrices en attendant d’elles et en leur faisant donner le maximum.
Aiko Mimasu, vieillie par un maquillage un brin trop visible, confère une touchante douceur inquiète au personnage de la mère, Aki.
- Hideko Takamine et Masayuki Mori dans Musume tsuma haha (1960)
Hideko Takamine parvient à faire de la bru Kazuko une étonnante figure de l’ombre, obstinément sur la réserve mais observatrice aux aguets qui se révèle moins passive qu’elle ne le fait paraître.
Enfin, et surtout, l’immense Setsuko Hara bouleverse et émerveille dans le rôle de Sanae, la (plus si) jeune veuve renonçant inutilement à sa deuxième chance, et qui n’est pas sans rappeler celui qu’elle tenait dans Voyage à Tokyo.
La proximité des sujets et la présence d’autres familiers du cinéma d’Ozu, comme Haruko Sugimura en étouffante belle mère et Chishû Ryû dans une apparition aussi brève que savoureuse, invitent d’ailleurs à une comparaison entre les deux films.
- Setsuko Hara dans Musume tsuma haha (1960)
Celui de Naruse se présente sous des dehors plus légers, voire pimpants : ample respiration du Tohoscope que le cinéaste utilise avec un instinct du cadre infaillible ; déserrement de l’étau dramatique par l’omniprésence d’un humour souvent caustique et de véritables gags visuels (le veston blanc immaculé de Koruji/Nakadai ; le malicieux film amateur) ; vivacité du montage ; angles parfois surprenants (les plans de pieds) ; travellings accompagnant les déplacements des personnages.
- Setsuko Hara et Tatsuya Nakadai dans Musume, tsuma, haha (Naruse 1960)
Mais le rythme andante, la virtuosité formelle, le ton enjoué et le refus de céder au pathos ne rendent finalement que plus poignantes les situations insolubles que le film expose sans offrir au spectateur le confort d’une interprétation toute faite et, justement, d’une solution.
L’alchimie narusienne entre la joie et la tristesse, la légèreté exubérante et la précision implacable d’un regard sans illusions est pleinement et superbement à l’oeuvre dans cette oeuvre parfois considérée à tort comme mineure.
- Musume tsuma haha (1960)
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.