Le 6 août 2024
Le second volet de la Trilogie marseillaise est sans doute le meilleur. Le pittoresque s’efface un peu face au mélodrame assumé et Pagnol utilise avec brio les possibilités du cinéma parlant, accordant une place prépondérante au dialogue.
- Réalisateur : Marc Allégret
- Acteurs : Pierre Fresnay, Raimu, Édouard Delmont, Orane Demazis, Fernand Charpin, Robert Vattier, Marcel Maupi, Alida Rouffe, Odette Roger, Milly Mathis, Auguste Mourriès
- Genre : Comédie dramatique, Noir et blanc, Film pour ou sur la famille
- Nationalité : Français
- Distributeur : Carlotta Films, Mission
- Durée : 2h06mn
- Reprise: 24 juillet 2024
- Date de sortie : 2 novembre 1932
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– Reprise en version restaurée : 24 juillet 2024
Résumé : Marius a embarqué sur « La Malaisie », cédant à l’irrépressible appel du large. Il a laissé derrière lui son vieux père César et sa fiancée Fanny, qui porte son enfant. Sans nouvelles de l’homme qu’elle aime depuis plusieurs mois, la jeune femme se résout à épouser le brave Honoré Panisse pour donner un père à son enfant. Très épris de Fanny et ravi de s’assurer une descendance, Panisse adopte le petit Césariot. Mais un jour, Marius revient…
LA TRILOGIE MARSEILLAISE : MARIUS
LA TRILOGIE MARSEILLAISE : CÉSAR
Critique : Second volet de la Trilogie marseillaise, après Marius et avant César, Fanny est l’adaptation de la pièce éponyme créée 5 décembre 1931 au théâtre de Paris. Cette représentation scénique avait eu lieu après la sortie cinématographique du premier segment. L’on suit donc les mésaventures sentimentales de Fanny (Orane Demazis), dont le fiancé Marius (Pierre Fresnay) a quitté Marseille pour s’engager sur un navire. Enceinte, la jeune fille n’a d’autre issue que d’épouser le quinquagénaire Panisse (Fernand Charpin), un brave homme fortuné qui est aussi un vieil ami de César (Raimu), le père de Marius. Écrit et dialogué par Marcel Pagnol, le scénario s’inscrit dans le contexte de l’époque, qui voyait les mères célibataires mises au banc de la société, d’autant plus que l’avortement restait une issue impensable (le film n’envisage d’ailleurs pas cette question, contrairement à L’événement). Pagnol véhicule un beau message d’humanisme, refusant de stigmatiser moralement la jeune fille, et décrivant les compromissions d’une société patriarcale et hypocrite ne jurant que par le respect des conventions, comme il le montrera plus tard avec Angèle et La fille du puisatier.
- © Carlotta Films
Le propos est de surcroît très moderne, avec un discours sur l’adoption qui anticipe la thématique de Tel père, tel fils de Kore-eda. « Le père, c’est celui qui a fait l’enfant ou celui qui paye les biberons ? », demande le marin lors de son retour. « Le père, c’est celui qui aime », assène le patriarche. Le pittoresque de Marius est beaucoup plus en filigrane. Ici, point de partie de cartes où l’on se fend le cœur, à peine quelques digressions comiques mettant en scène Monsieur Brun (Robert Vattier), le chauffeur (Marcel Maupi) et Escartefigue (Auguste Mourriès). Et si les échanges avec la mère (Alida Rouffe) et la tante (Milly Matthis) arrachent plusieurs rires lors de l’aveu de la fille déshonorée, cela est dû au fait que l’humour est la politesse du désespoir. Sur le plan de la mise en scène, Fanny est remarquable. Le réalisateur avait pourtant provoqué en déclarant : « Le film parlant doit réinventer le théâtre » ou « L’art du théâtre ressuscite sous une autre forme et va connaître une prospérité sans précédent ».
- © Carlotta Films
Loin de faire du « théâtre en conserve » comme l’estimaient ses détracteurs, dramaturges et ex-cinéastes du muet, Pagnol réalise une véritable œuvre de cinéma, assumant la priorité au texte, comme le feront Guitry, Mankiewicz ou Rohmer, ce qui était novateur à une période où l’on expérimentait les possibilités du parlant. Certes, c’est Marc Allégret qui est officiellement derrière la caméra, mais c’est parce que Pagnol, qui venait du théâtre, ne maîtrisait pas encore la technique d’un art qui d’ailleurs tentait de trouver sa voie depuis la fin du muet. Et il faut dire que Fanny éblouit par ses plans fixes magistraux (manière de contourner la lourdeur des caméras du début du parlant) mais aussi d’autre passages dont le travelling qui accompagne la déambulation de Fanny dans les rues de Marseille, à sa sortie de la visite chez le médecin. Souvent diffusée à la télévision des années 70 à 90, la Trilogie marseillaise bénéficie d’une sortie en salle en 2024, à l’initiative du distributeur Carlotta qui propose une rétrospective Pagnol en dix films.
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