Le 1er septembre 2024
En dépit de l’interprétation absolument épatante de l’actrice principale, Nisrin Eradi, le nouveau film de Nabil Ayouch ne décolle pas du fait d’un scénario trop classique et manquant de rythme.
- Réalisateur : Nabil Ayouch
- Acteurs : Nisrin Erradi , Joud Chamihy, Jalila Tlemsi
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Marocain
- Distributeur : Ad Vitam
- Durée : 1h42mn
- Date de sortie : 18 décembre 2024
- Festival : Festival de Cannes 2024, Festival d’Angoulême 2024
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– Festival de Cannes 2024 : Sélection officielle, Cannes Première
Résumé : Touda rêve de devenir une Cheikha, une artiste traditionnelle marocaine, qui chante sans pudeur ni censure des textes de résistance, d’amour et d’émancipation, transmis depuis des générations. Se produisant tous les soirs dans les bars de sa petite ville de province sous le regard des hommes, Touda nourrit l’espoir d’un avenir meilleur pour elle et son fils. Maltraitée et humiliée, elle décide de tout quitter pour les lumières de Casablanca...
Critique : En 2022, Nabil Ayouch proposait déjà sur la Croisette un film dense et coloré, Haut et fort, où la musique tenait une place primordiale à travers un groupe de jeunes Marocains s’adonnant au rap. De nouveau, la musique s’invite avec ce nouveau long-métrage, dans la peau d’une jeune interprète d’Aïta, qui sont des chants traditionnels de langue berbère, objets de convoitise sexuelle et de pouvoir, mais aussi de transmission de la tradition. Touda s’ennuie dans le village de montages où elle habite, rêve de gloire, et surtout se rend compte que ses activités de chanteuse génèrent des attitudes absolument inacceptables de la part des hommes. D’ailleurs, la première séquence la montre sur un plateau de montagnes, au milieu des forêts, où elle entonne des chants qui génèrent très rapidement des attouchements du public, jusqu’à un viol qu’elle subit en fin de soirée festive.
- © Les Films du Nouveau Monde - Ali n’ Productions - Velvet Films - Snowglobe - Viking Film - Staer - France 3 Cinéma
La messe est dite. Everybody Loves Tunda a tout du récit balzacien avec les ambitions d’une jeune danseuse qui monte à la capitale pour réussir, dans un parcours jonché de désillusions et d’espoir. Ce qui apporte en réalité un intérêt véritable au film demeure les scènes de danse et de chant. La comédienne fait montre d’un rythme, d’une agilité dans les postures, qui laisseraient presque penser qu’elle a chanté et dansé toute sa vie. Mais l’intérêt s’arrête là, la fiction se perdant dans un récit des plus classiques. Les métaphores à l’usage de la montée et de la chute de la jeune comme l’ascenseur sont elles-mêmes trop insistantes et perdent la narration dans un trop-plein de symbolisme et de facilités narratives. Même l’enfant de la protagoniste est handicapé, ce qui ne manque pas de rajouter au mélodrame ambiant.
On est bien loin du rythme, de la fougue et de la militance de Haut et fort. Le long-métrage semble cousu de fil blanc dans un récit trop romanesque pour être sincère. L’intention du réalisateur sur le statut des chanteuse d’Aïta est brouillé par une surenchère de bons sentiments très manichéens. Il faut tout de même saluer la beauté des images du Maroc, à l’exception de Casablanca réduite à un chaos bruyant où les marchands de sommeil s’enrichissent et les tenanciers de bar exploitent leur personnel. En tout cas, c’est un film qu’il faut éventuellement aller voir pour sa musique. Toutes les scènes de danse et de chant populaires ou traditionnels sont très réussies, témoignant du talent incontestable de Nabil Ayouch dans la mise en scène et le maniement des images.
- © Les Films du Nouveau Monde - Ali n’ Productions - Velvet Films - Snowglobe - Viking Film - Staer - France 3 Cinéma
Le dénouement laisse aussi sur la faim, comme un goût amer d’un scénario insuffisamment travaillé, ou trop écrit dans la tradition des romans du dix-neuvième siècle en France. Nabil Ayouch avait l’occasion, à travers ce portrait haut en couleur, de témoigner de la nécessité de conserver le patrimoine des chansons traditionnelles au Maroc, plutôt que de se contenter de suivre le parcours vers la gloire, par avance truffé d’échecs, d’une provinciale enchanteresse.
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