Hymne au pardon
Le 20 avril 2011
Une sombre histoire de vengeance qui se transforme en une magnifique aventure humaine où la haine devient pardon.
- Réalisateur : Mahamat-Saleh Haroun
- Acteurs : Ali Bacha Barkaï, Youssouf Djaoro
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Autrichien, Belge
– Durée : 1h35mn
Une sombre histoire de vengeance qui se transforme en une magnifique aventure humaine où la haine devient pardon. Ce poignant tour de pellicule est signé Mahamat-Saleh Haroun.
L’argument : Tchad, 2006. Les autorités de ce pays en guerre civile depuis 1965 viennent d’accorder l’amnistie à tous les criminels de guerre. Si le gouvernement peut pardonner, ce n’est pas le cas du grand-père d’Atim, seize ans, qui l’envoie, armé d’un révolver sur les traces d’Abdallah Nassara, l’assassin de son père. Il le retrouve dans la capitale, N’Djamena, où l’ancien soldat, reconverti en boulanger, le prend sous son aile et fait de lui son apprenti.
Notre avis : Atim doit venger un père qu’il n’a jamais connu et il rencontre un homme, objet de toute sa haine, qui se propose de l’adopter. Les voies, plutôt les sentiments, des hommes peuvent être aussi impénétrables. Ce que nous démontre encore une fois Mahamat-Saleh Haroun dans Daratt. En revenant sur un thème qu’il avait déjà traité dans Abouna, l’absence du père, le cinéaste tchadien filme l’ambiguïté croissante des relations que tissent deux hommes que tout sépare : il à la soixantaine, lui est un adolescent. Il est son patron, lui n’est que simple employé aux ordres. Deux ennemis dont l’un se doute seulement de sa condition, réunis dans un silence buté qui hurle la tension qui les habite. Si elle est autant perceptible à l’écran, c’est que le réalisateur s’en est assuré hors caméra, en interdisant à ses comédiens de s’adresser la parole en dehors des prises de vue. Comme souvent, Mahama-Saleh Haroun ne s’embarrasse pas de dialogues et il s’est offert, à dessein, des personnages interprétés avec subtilité par des acteurs non-professionnels. Atim est un être renfermé, animé d’une colère sourde et les cordes vocales de Nassara sont endommagées, séquelle de la guerre.
Haroun nous donne à voir des corps enfarinés, trempés de sueur par le labeur, des hommes qui s’épient à la recherche de la moindre faille, des êtres livrés à leurs contradictions et à leurs (vieux) démons, des âmes en lutte entre le bien et le mal. Le rythme de Daratt, engourdissant de prime abord, s’avère en définitive le plus approprié pour décrire la complexité des sentiments qui animent Atim et Nassara. Le premier en vient à éprouver quelque chose comme de l’affection pour un homme qu’il a appris à détester. Le second ressent des sentiments paternels pour un adolescent qui est une menace permanente.
Daratt est également une réflexion sur l’impunité des bourreaux qui narguent leurs victimes. C’est le cas au Tchad, ce vaste pays d’Afrique centrale miné par un conflit, vieux de quarante et un ans. La vengeance, c’est se faire justice soi-même. Seulement, comme le grand-père d’Atim, la haine est aveugle, mais le pardon, lui, rend la vue, dirait-on pour paraphraser l’adage. La fiction a obtenu le Prix spécial du jury de la Mostra de Venise. Une récompense bien méritée pour cette leçon d’humanisme.
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Norman06 22 avril 2009
Daratt, saison sèche - la critique
Belle œuvre sur les rapports de filiation et la responsabilité politique. Un affrontement psychologique envoûtant. Le film mériterait la médiatisation de Bamako.