Notre avis : Il en faut du nez pour s’attaquer avec tant d’ingéniosité à pareil monument théâtral. Mais Bastien Ossard, le metteur en scène, ne manque pas d’audace. D’abord, il ose l’éclairage à la bougie, douce façon de créer une ambiance intimiste au cœur de ce cocon qu’est le théâtre du Funambule et d’accompagner avec délicatesse le public vers cette nouvelle découverte d’un texte intemporel. Il prend la liberté de réduire cette pièce longue à 1h40, tout en réalisant le tour de force de ne porter préjudice ni au déroulé du texte, ni à la poésie qui s’en dégage. Et même si vous n’êtes guère friands des récits en alexandrins, il est fort à parier que la vivacité de la mise en scène et la présence de ces trois comédiennes virevoltantes compenseront bien vite cette difficulté, permettant aux petits comme aux grands de profiter de ce spectacle original et inédit. Car la plus belle surprise est d’avoir choisi de féminiser Cyrano et, pour ce faire, d’avoir fait appel à trois artistes qui manient avec la même dextérité les arts du spectacle. Du chant à la danse, de la diction à la gestuelle, le jeu est sûr, le rythme soutenu et le frisson assuré. Tambour battant et sans l’ombre d’une hésitation, elles incarnent tour à tour Roxane/Montfleury/ Ragueneau/Christian de Neuvillette/le comte de Guiche...
La scène, dépouillée de tout élément de décor, se remplit immédiatement de leur énergie qu’elles promènent aussi dans les allées de la salle. Le visage peint, cachées derrières leurs masques, vêtues de costumes colorés, elles resplendissent de leur capacité à transmettre autant l’émotion que l’humour ou la fantaisie.
Ce spectacle étonnant et savoureux se joue encore pour quelques représentations. Il serait dommage de passer à côté.