Café-Pharmacie
Le 19 avril 2015
Observateur aigu et jamais complaisant, Naruse dirige d’une main ferme un casting prestigieux entourant l’impeccable Hideko Takamine dans ce beau portrait de femme.
- Réalisateur : Mikio Naruse
- Acteurs : Toshirō Mifune, Minoru Chiaki, Hideko Takamine, Haruo Tanaka, Yôko Sugi, Chieko Nakakita, Sadako Sawamura, Daisuke Katō, Ranko Hanai, Akemi Negishi, Keiju Kobayashi, Eiko Miyoshi
- Genre : Comédie dramatique
- Durée : 1h41mn
- Titre original : 妻の心
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Sortie au Japon : 3 mai 1956
Observateur aigu et jamais complaisant, Naruse dirige d’une main ferme un casting prestigieux entourant l’impeccable Hideko Takamine dans ce beau portrait de femme.
L’argument : Dans une ville proche de Tôkyô, la veuve Tomita voit péricliter son magasin autrefois prospère. Son fils Shinji accumule les échecs en affaires et compte beaucoup sur sa femme Kiyoko qui voudrait ouvrir un café. Elle tente pour cela d’économiser mais la famille de son mari utilise ses épargnes pour payer le mariage de sa belle-sœur…
Notre avis : Septième collaboration du tandem Naruse - Hideko Takamine (sur 17 !), Coeur d’épouse (ou Le coeur d’une épouse) s’inscrit, comme le magnifique Tourments (1964), dans une série de portraits de femmes énergiques faisant face à l’accumulation des tracas et contrariétés d’un quotidien qu’elle semblent faire avancer toutes seules, leur entourage s’en remettant le plus souvent à elles pour régler tous les problèmes tout en ne se privant pas de leur mettre des batons dans les roues.
- 妻の心 - Tsuma no kokoro 1956 - Mikio Naruse - Toho
Ici l’actrice incarne l’épouse d’un pharmacien dans une petite ville de province dont la belle photo signée Masao Tamai accentue la grisaille, supportant avec un sourire souvent contraint son mari gentil mais pataud et indécis (Keiju Kobayashi), sa belle mère pas méchante mais un brin grincheuse et très douée pour culpabiliser tout le monde (Eiko Miyoshi, qui joue de sa mine patibulaire sans faire pour autant de son personnage une caricature), un beau-frère parasite (Minoru Chiaki, irrésistible en faux-jeton soucieux d’esquiver toute confrontation directe) s’incrustant inopinément dans la demeure familliale déjà périclitante avec sa femme (Chieko Nakakita, parfaite elle aussi en fausse discrète omniprésente) et sa fille taciturne mais néanmoins encombrante (le bruit du ballon quand elle joue dans l’entrée) ; sans parler de la soeur cadette (la belle Akemi Negishi, interprète de Sternberg et de Kurosawa) mariée à grands frais mais se demandant bientôt si elle a fait le bon choix.
- Hideko Takamine et Keiji Kobayashi dans 妻の心 - Tsuma no kokoro 1956 - Mikio Naruse - Toho
- Hideko Takamine et Toshiro Mifune dans 妻の心 - Tsuma no kokoro 1956 - Mikio Naruse - Toho
On voit que les touches humoristiques abondent et le film est presque constamment au bord (juste au bord) de la franche comédie tout en frôlant fréquemment le drame : les insinuations perfides de l’épouse jalouse jouée par Ranko Hanai ou le couple de restaurateurs débonnaires incarnés par Sadako Sawamura et l’inévitable Daisuke Kato ; mais aussi la disparition de la geisha suicidaire dont on apprend par la suite qu’elle s’est effectivement tuée ou la rupture finale évitée de justesse.
- Chieko Nakakita, Minoru Chiaki et Eiko Miyoshi dans 妻の心 - Tsuma no kokoro 1956 - Mikio Naruse - Toho
Naruse, avec un doigté sans faille, évite soigneusement de s’engouffrer dans les pièges tendus trop habilement par un scénario visant à aligner le maximum de situations attendues (l’héroïne et le jeune banquier amoureux bloqués par la pluie dans une auberge ; l’irruption de la serveuse empêchant juste à temps l’aveu imminent ; la promenade-travelling qui suit) et à mettre en valeur chacun des membres d’un casting prestigieux incluant, outre tous ceux que nous avons déjà cités, Haruo Tanaka (en compagnon de débauche du mari), Yoko Sugi (en amie confidente) et même un surprenant Toshiro Mifune, cabotinant, mais en mode retenu, dans son rôle inattendu de banquier-soupirant à la touchante et maladroite délicatesse.
Le cinéaste aguerri (c’est son soixante-douzième film) dirige tout ce beau monde d’une main ferme et s’il évite le comique trop appuyé, l’effusion sentimentale ou le brio formel ostentatoire c’est parce-que l’accuité de son regard ne souffre aucune complaisance. Tsuma no kokoro est donc un admirable petit Naruse que la tenue impeccable de la mise en scène et l’humour subtil rendent infininiment précieux et émouvant.
- 妻の心 - Tsuma no kokoro 1956 - Mikio Naruse - Toho
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