Le 7 février 2007
La DV mettra-t-elle à mort le cinéma ? Réponse provisoire avec le dernier cauchemar de David Lynch.
La DV mettra-t-elle à mort le cinéma ? Réponse provisoire avec le dernier cauchemar de David Lynch.
Le confort de l’artiste doit-il passer par la maltraitance du spectateur ? C’est la question pertinente de la semaine qui s’impose à la sortie du dernier David Lynch, le monumentalement long INLAND EMPIRE, qui partage les critiques jusqu’au sein de notre rédaction. Véritable bourbier de clichés abscons ou fruit génial d’un esprit supérieur ? On laissera le public faire sa propre opinion. Le problème se situe ailleurs, dans l’essence cinématographique même de l’œuvre en jeu dans la qualité des images qui la composent et qui trahissent un malaise contemporain récurrent. Le dernier Lynch est effroyablement laid. Ses images sont troubles, définies approximativement. Elles bavent et rembarrent tous les canons esthétiques d’un cinéaste pourtant célébré pour la majesté de son filmage (pensons à l’élégance glamour de Mulholland drive). On s’étonne même parfois de comparer la texture et l’éclairage de son dernier opus à un porno. Bienvenue dans les méandres de la DV !
Outil économique que s’arrachent les réalisateurs en herbe parce financièrement ils ne peuvent pas ambitionner mieux, la caméra numérique est aussi utilisée par des réalisateurs reconnus pour sa maniabilité, sa facilité d’utilisation, sa légèreté, ses incroyables possibilités sur l’instant de tournage. En quelques mots, elle leur apporte un confort formidable lors des moments les plus stressants de l’effort créatif.
Une fois le tournage achevé et l’œuvre distribuée en salles, le bébé digital appartient désormais au public et à l’histoire du septième art. Il dévoile en fonction des moyens mis en œuvre une laideur variable, souvent insupportable pour les exigences de l’œil, habitué à découvrir sur grand écran une image gonflée et retravaillée qui offre une alternative émotionnelle à la vraie vie. Mais voilà, pour quelques mois de confort, le cinéaste usant et abusant de la DV semble avoir égoïstement oublié ceux qui devront subir ses caprices de fainéant. Ainsi Lynch nous offre visuellement les moments les plus affreux de sa carrière et pour ceux qui tomberont sous le charme de l’incroyable mécanisme absurde de la trame, il n’y aura pas de recours possible pour le découvrir dans de bonnes conditions. L’éternité d’INLAND EMPIRE sera toujours laide, terne et dégueulasse, peu importe les conditions de visionnage. Son rendu esthétique sera peut-être irregardable en DVD ou à la télé, l’image numérique ne faisant aucun cadeau à ce type d’image. Quand on sait que le bonhomme compte continuer à transgresser toutes ses valeurs cinématographiques en utilisant encore et toujours ce type de caméra, l’avenir de son œuvre fait froid dans le dos, et l’on se demande bien ce qui pourra bien nous pousser à continuer à aller en salles pour voir de telles immondices esthétiques.
Ce point de vue ne portant que sur la qualité de l’image, reconnaissons au moins au dernier Lynch une radicalité artistique qui impose toutefois d’être découverte. Le réalisateur de Twin Peaks demeure le maître de l’étrange sans concession, toujours prêt à remettre sa relation au spectateur en question et pour cette raison INLAND EMPIRE est paradoxalement à tout ce qui vient d’être dit la première bonne raison d’aller au cinéma cette semaine, quitte à le rejeter en bloc après la projection.
Raison numéro deux : Cria cuervos ! Magnifique métaphore de la fin du franquisme, l’inoubliable bijou morbide de Carlos Saura revient sur nos écrans magnifié par le regard de la petite Ana Torrent et le tube de Janet Porque te vas.
Raison numéro trois : Agua ! Une histoire d’eau et d’hommes en provenance d’une Argentine toujours aussi prolifique. Un bain de fraîcheur interprété par l’un des comédiens de Ronde de nuit.
Raison numéro quatre : Le petit monde de Charlotte Parce que les enfants méritent aussi le respect, cette bien belle initiation au cycle de la vie apaisera les enfants et leurs parents. Un conte classieux à découvrir sur grand écran.
Raison numéro cinq : Massacre à la tronçonneuse, le commencement Le préquel du remake. Un cinéma sauvage et furieux qui ravira les aficionados d’horreur en leur offrant du gore et des frissons à foison. Un vrai bon spectacle par ailleurs.
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