La douleur
Le 10 novembre 2009
Au Tchad, la réalité des oubliés du Darfour. Au loin des villages est un témoignage pudique et saisissant de ce conflit interminable.
- Réalisateur : Olivier Zuchuat
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 11 novembre 2009
- Plus d'informations : Le site officiel
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– Durée : 1h27mn
– Titre original : Far from the village
Au Tchad, la réalité des oubliés du Darfour. Au loin des villages est un témoignage pudique et saisissant de ce conflit interminable.
L’argument : En avril 2006, 13 000 personnes de l’ethnie Dajo se réfugient dans la plaine de Gouroukoun, à l’Est du Tchad. Tous sont des survivants de la guerre du Darfour. Ils y construisent un camp, s’y enferment et s’y inventent une survie.
L’auteur s’est enfermé à son tour dans cette prison sans mur. Des images patientes racontent l’interminable temps de l’attente. Une vie au ralenti qui s’égrène, comme suspendue dans le dénuement.
Des réfugiés prennent longuement la parole, des enfants dessinent des batailles, des petites filles fredonnent des chansons guerrières : un film de guerre, sans aucune image de guerre...
Notre avis : Rarement un film n’aura aussi bien porté son titre. Au loin des villages retranscrit parfaitement ce qui se passe : la guerre civile au Darfour depuis 2003 ne fait que très peu la une des quotidiens, malgré la situation dramatique qui trouve, de surcroît, son origine dans des conflits ethniques datant de plusieurs dizaines d’années. Les villages soudanais ne sont malheureusement qu’une lointaine réalité pour les occidentaux que nous sommes ; ce long-métrage apporte alors des éléments de témoignage de ces oubliés.
Olivier Zuchuat pose sa caméra discrètement au cœur des territoires nus du Tchad qui accueillent les populations déplacées du Darfour. Les plans sont fixes, désespérément fixes, à l’image de la situation figée de ces familles déracinées, écartelées, dont les espoirs se sont envolés avec la destruction de leur village et de leurs proches assassinés. A n’en pas douter, chacun d’eux vit avec moins d’un dollar par jour, la préoccupation première des parents est de trouver de quoi nourrir leurs enfants ; peu importe ce qui les nourrit, du moment que leurs fils et leurs filles survivent. Le cinéaste réalise des séquences d’une beauté aussi troublante que la simplicité avec laquelle les réfugiés s’expriment. Personne ne bouge, l’image a des allures de photographie et tout à coup, une femme relate sa lutte quotidienne, les combats auxquels son mari et ceux de ses amies ont pris part et qui ne sont jamais revenus. La caméra ne peut bouger, la culture de ces populations est en train de disparaître progressivement, suite à des guerres civiles sans fin.
Quelques hommes ont survécu aux combats et ceux-ci, d’une dignité exemplaire, citent le nom de tous ceux de leur village et des alentours qui ont disparu. Souffle coupé, on ne peut qu’appréhender le temps qui s’écoule, synonyme du nombre croissant des disparus. Et la séquence s’étire... Au loin des villages fait ainsi office de plaque commémorative pour tous ces individus qui se sont battus avec conviction. Les combats sont décrits sans chercher à les justifier ou à entrer dans des considérations géopolitiques, et encore moins morales ; ces témoins sont là pour parler des faits et seul l’aspect humain est important : ce sont les hommes que l’on pleure.
Le silence est omniprésent. Par pudeur, Olivier Zuchuat a omis toute voix-off qui pourrait contrevenir ou donner un sens subjectivé à des images déjà éloquentes. La musique est également absente. En effet, comment manifester de la joie quand tous ceux que l’on aimait ne sont plus là ? Comment exprimer quelques sentiments quand on n’a plus rien ? Pas de lamentation, cette douleur est au-delà de toute forme de manifestation mais les regards, eux, parlent. Et l’on est saisi par leur puissance évocatrice. Olivier Zuchuat, merci.
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